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L’Inquisition, une guerre raciale d’éviction, les combats souterrains chez les Jésuites en Espagne: l’attaque.

Original Article: Andrew Joyce: “Review: The Jesuit Order as a Synagogue of Jews.

Saint Ignace de Loyola, fondateur de la compagnie de Jésus le 27 septembre 1540 à Montmartre: on se demande de qui ce tableau célèbre la gloriam, Dieu ou Loyola.

“Les frères de la circoncision ont perverti tout l’édifice de la Société [de Jésus]. En tant que fils de ce monde [donc du Diable] experts dans l’art de séduire leurs semblables avides de nouveautés [semblables «en apparence» = les chrétiens], ils n’ont pas de mal à exciter les passions et à détruire l’unité et le gouvernement de l’âme [de l’Ordre de Jésus]»
Lorenzo Maggio, Curie Jésuite de Rome, 1586.

À ce jour, le cadre théorique le plus propice à la compréhension des formes cryptiques du judaïsme a été formulé par Kevin MacDonald dans un ouvrage qui a fait date: Separation and Its Discontents: Toward and Evolutionary Theory of Anti-Semitism. L’essentiel de son quatrième chapitre (1998/2004: 121–132) est consacré au «racisme réactif à l’époque de l’inquisition espagnole». MacDonald y avance l’idée selon laquelle l’Inquisition ibérique au cours des XVe et XVIe siècles était une lutte raciale d’éviction, institutionnelle et violente, motivée par la compétition sur les ressources avec les Juifs et en particulier les cryptos Juifs se faisant passer pour des chrétiens. Le contexte historique est celui de la conversion forcée des Juifs d’Espagne en 1391, à l’issue de laquelle ces «nouveaux chrétiens» (ou conversos) se sont assuré (ou plutôt, ont maintenu) une domination dans les domaines tels que la justice, la finance, la diplomatie, l’administration publique et tout un éventail d’activités économiques. MacDonald estime qu’en dépit d’une conversion de façade, ces nouveaux chrétiens «doivent être considérés comme une communauté historiquement juive» qui a simplement fait en sorte de pouvoir poursuivre son intérêt ethnique propre. C’est à ce titre qu’on a vu des Juifs aisés acheter des charges ecclésiales pour leur progéniture, ce qui a eu  pour conséquence que nombre de prélats en Espagne étaient en fait d’ascendance juive.

Indirectement, et sans doute involontairement, ce cadre théorique de MacDonald se retrouve en grande partie dans le The Jesuit Order as a Synagogue of Jews (2010) de Robert Aleksander Maryks du Boston College, qui confirme à son tour que l’entrée des Juifs dans la première Compagnie de Jésus suit le modèle classique de népotisme ethnique et de tartuferie religieuse qu’on leur connaît. Reprenant l’examen de la même aire géographique durant la même période, Maryks offre un panorama des premières années de la Compagnie de Jésus durant lesquelles une lutte sans merci s’est jouée pour le contrôle de l’âme et de la destinée de l’Ordre entre un crypto-bloc juif très puissant et un  réseau rival composé de chrétiens Européens.

Dans un livre de facture un peu brute mais intéressant, Maryks éclaire ce conflit sur la base de documents jusqu’ici ignorés, mettant au passage en lumière certaines des caractéristiques les plus récurrentes génératrices d’antisémitisme réactif: l’ethnocentrisme, le népotisme, la tendance à tout monopoliser et la recherche d’alliance stratégique avec l’élite blanche. Mais peut-être le plus original dans ce travail, c’est l’accent mis sur les contre-mesures juives aux efforts des Européens visant à étouffer leur influence, certaines d’entre elles étant remarquables par leur proximité avec des exemples récents de propagande apologétique juive. À ce titre, The Jesuit Order as a Synagogue of Jews est hautement recommandé à quiconque cherche à se faire une idée, via une étude de cas historique facile à digérer, de la dynamique du conflit ethnique entre les Juifs et les Européens.

L’ouvrage se décompose en quatre chapitres bien rythmés. Le premier présente au lecteur le «contexte historique de la discrimination par la pureté du sang (1391 – 1547)», une introduction détaillée à la nature du problème posé par «les nouveaux chrétiens» dans la péninsule ibérique, elle se suffit à elle-même, mais elle gagne à être lue en parallèle du travail de MacDonald sur le même thème. Le deuxième chapitre concerne «la politique proconverso des débuts (1540 – 1572)», il met en exergue l’intensité du noyautage des postes clés de l’ordre jésuitique par les crypto-juifs, ces derniers, adaptant leurs positions idéologiques à leurs intérêts, parvenant à établir un quasi-monopole au sommet de la hiérarchie qui s’étendra jusqu’au Vatican. Le troisième chapitre, «Discrimination envers les Jésuites d’ascendance juive (1573 – 1593)», traite de l’apparition d’un mouvement de réaction à la stratégie des chrétiens-circoncis, on y trouve une présentation de ses grandes figures et une analyse de leurs motivations. Le quatrième chapitre, «l’opposition jésuitique à la discrimination par la pureté du sang (1576 – 1608)», passe en revue les efforts des jésuites crypto-juifs pour contrecarrer la stratégie de riposte européenne, on y retrouve souvent les mêmes tactiques et positions qui nous sont si familières aujourd’hui comme marque de fabrique des courants intellectuels juifs.

Cette séquence interne à l’Ordre jésuitique est exactement parallèle à celle de l’Inquisition en général: des nouveaux chrétiens s’établissant aux postes-clés de la politique, des affaires et de la culture espagnole, une riposte des chrétiens européens visant à reprendre le pouvoir, riposte elle-même suivie d’une contre-attaque juive contre l’Inquisition et le gouvernement espagnol en général, ce dernier jouant à l’époque un rôle de premier plan sur la scène internationale.

L’un des points forts de cette enquête haletante de Maryks, c’est qu’elle a l’avantage de pouvoir s’appuyer sur des découvertes généalogiques relativement récentes qui prouvent sans aucun doute possible que nombre d’individus jadis simplement «accusés» d’être des crypto-juifs l’étaient incontestablement. Maryks peut donc s’avancer avec assurance dans cette période où la lignée, tout en étant vitale, était plongée dans un brouillard d’accusations, de démentis et de contre-accusations. Selon les mots de l’auteur (xxix), «les tensions raciales ont joué un rôle central dans l’histoire de l’Ordre jésuitique à ses débuts.

En ouverture de son livre, Maryks se rappelle comme à la suite d’un article sur l’influence des conversos chez les Jésuites, il a reçu un e-mail de quelqu’un originaire de la péninsule ibérique, l’e-mail témoignait de l’étonnante survivance de pratiques crypto-juives dans la famille de l’expéditeur:

Du vendredi soir au samedi soir, son grand-père masquait l’image du petit Jésus d’une reproduction de saint Antoine qu’il avait chez lui. En fait, il s’agissait d’une boîte à musique repliable. Le vendredi soir, il appuyait sur un bouton pour rembobiner le rouleau en sorte de faire disparaître le haut de l’image, celle-ci montrant Jésus bébé dans les bras de Saint Antoine. Le samedi, il appuyait de nouveau sur le bouton pour que Jésus ressorte de sa cachette, niché dans les bras du saint. En tant que fils aîné, l’histoire a été transmise à mon correspondant par son père qui lui demandait de ne manger que de la nourriture casher. (xv)

La persistance d’une forme aussi naïve, et dans ce cas inoffensive, de cryptojudaïsme au cours de ce qu’on imagine être le début du XXe siècle pourrait sembler anodine, rien d’autre qu’une curiosité socio-historique, en réalité, il s’agit d’un vestige modeste mais significatif de ce qui fut autrefois un puissant moyen de préserver la stratégie évolutionnaire de groupe des Juifs de la péninsule ibérique après 1391 —  un environnement hautement hostile. Dans un contexte politique, social et religieux dépourvu de synagogue et des signes les plus ostentatoires du judaïsme, ces menus rituels – comme masquer l’image de Jésus ou l’observation discrète des règles alimentaires – devenaient des moyens vitaux de maintenir la cohésion de groupe.

Pendant longtemps, ces méthodes se sont avérées essentielles à la continuité du judaïsme au nez et la barbe de la société christianisée hôte. Mieux, elle a permis aux conversos d’étendre le monopole de leur népotisme à tout un éventail de domaines civils ou religieux (chrétiens). Gare toutefois si ce petit jeu était découvert, les conséquences pouvaient être terribles. Mais comme l’indique Maryks (xxii), de sa fondation en 1540 à 1593 l’Ordre jésuite était sans méfiance et ne prévoyait pas de règles discriminatoires à l’encontre de ses membres d’ascendance juive, durant ces années, au contraire, les conversos jésuites «ont pu occuper les plus hautes fonctions administratives et présider à son développement institutionnel et spirituel». Ce n’est que progressivement qu’une forte résistance à ce monopole a commencé à se développer et de 1593 à 1608 on assiste à une féroce lutte de pouvoir qui s’achève par la défaite du bloc crypto-juif et l’établissement  de règles prohibant l’entrée de candidat de «sang impur». Ces règles sont restées en vigueur jusqu’en 1946 et exigeaient l’examen de l’arbre généalogique en remontant cinq générations en arrière.

Aux Origines Juives des Jésuites

Le15 août 1534, Ignatius de Loyola (né Íñigo López de Loyola), un Basque originaire de la ville de Loyola en Espagne, et ses six compagnons, tous étudiants à l’université de Paris, se réunissaient à l’extérieur de la ville, à Montmartre, dans une crypte sous l’église Saint-Denis pour prononcer leurs vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance. Les six compagnons d’Ignatius étaient: François Xavier de Navarre (dans l’Espagne actuelle), Alfonso Salmeron, Diego Laínez, Nicolás Bobadilla de Castille, Pierre Favre de Savoie, et Simão Rodrigues du Portugal. À ce stade, ils se désignaient en «compagnon de Jésus» (Compañía de Jesús), ou indifféremment,  Amigos en El Señor (les amis du Seigneur). Le «Compañía» est devenu en latin «societas», qui vient de «socius» – partenaire ou  camarade. Ceci va vite se changer en «Société de Jésus» ou «Compagnie de Jésus» et c’est sous cette dénomination qu’ils vont se faire connaître. En 1537, les sept faisaient le voyage de Rome pour rechercher l’aval papal. Paul III fit leur éloge et leur permis d’être ordonnés prêtres. La fondation officielle de la Compagnie de Jésus eut lieu en 1540.

Dès l’origine, le poids des conversos dans la Compagnie de Jésus était fort. Des sept membres fondateurs, il ressort des éléments fournis par Maryks que quatre étaient indubitablement d’ascendance juive: Salmeron, Laínez, Bobadilla, et Rodrigues. Loyola lui-même était bien connu pour son fort philosémitisme et dans une thèse récente, des arguments sont avancés qui tendent à prouver que ses grands-parents maternels étaient «sang  pour sang» conversos (son grand-père, le Dr. Martín García de Licona, était commerçant et conseiller à la Cour) [1], ce qui rend notre noble Basque halakhiquement Juif. Pour l’universitaire et spécialiste de l’Inquisition, Henry Kamen — lui-même Juif et qui a pu soutenir que l’Inquisition n’était qu’une «arme d’épuration sociale», principalement destinée à assurer l’éviction des Conversos de la compétition socio-économique — Loyola était «spirituellement un Sémite profondément sincère». [2]

Que «spirituellement»? Voire, il est à craindre que Kamen ne se laisse berner par l’omniprésence de la propagande des conversos. Comme l’explique fort bien Maryks, la réputation d’un Loyola fervent admirateur des Juifs repose principalement sur une série d’anecdotes et de citations qu’on lui attribue  — dont beaucoup sont tirées de biographies rédigées juste après sa mort par des Jésuites conversos cherchant à promouvoir et à défendre leur propre intérêt. Par exemple, la seule source dont on dispose pour affirmer que Loyola aurait par-dessus tout désiré avoir une origine juive pour pouvoir se considérer comme «un parent du Christ et de sa mère», c’est la toute première biographie officielle de Loyola — laquelle a été rédigée de la main de Pedro de Ribadeneyra, un converso. Or, Ribadeneyra est décrit par Maryks comme un «converso masqué» qui ne s’est pas gêné pour déformer ou cacher des faits maintenant bien établis, et notamment que l’Inquisition d’Alcalá avait accusé Loyola d’être un crypto-juif. (43) C’est l’un des aspects importants de la biographie Ribadeneyra, sa ligne générale même, l’idée qu’être Juif était un bon point particulièrement recherché  — le philosémitisme de Loyola(réel ou imaginé) étant destiné à créer des émules. Par contre les aspects moins avouables du cryptojudaïsme et leur répression par l’Inquisition étaient complètement occultés.

Que Loyola soit en fait un crypto-Juif ou qu’il soit vraiment un Européen animé d’un fort désire d’être Juifs reste à déterminer au moment où nous écrivons ces lignes. Ce qui est sûr en revanche, c’est qu’il s’est entouré de nombre de conversos et qu’il était opposé à toute discrimination envers eux au moment de l’entrée des candidats dans la Compagnie de Jésus. Maryks estime que philosémitisme et jeux cryptiques mis à part, Loyola était «motivé par le soutien financier sur lequel il savait pouvoir compter du réseau des conversos en Espagne»(xx). Si on suit Maryks dans cette lecture, Loyola était par conséquent bien conscient de la position des conversos au sein de l’élite de la société espagnole, et il était prêt à accepter leur argent en échange d’une politique non discriminatoire dans l’accès à la gouvernance de l’ordre.

Toute la question reste bien sûr de savoir pourquoi une élite crypto-juive voudrait bien soutenir financièrement et en personnel un ordre religieux chrétien. Le point important qu’il faut avoir à l’esprit, c’est que dans cette Europe de l’ère moderne balbutiante, religion et politique étaient intimement intriquées. Au travers des liens entre les congrégations religieuses et l’élite politique, même des ordres ayant fait vœux de pauvreté comme les Franciscains pouvaient exercer une forme d’influence socio-politique loin d’être négligeable. Cela était encore plus évident pour les ordres à forte vocation missionnaire qui jouaient souvent un rôle pionnier dans le développement économique des colonies.

William Caferro note que dans l’Italie de la Renaissance «l’élite politique Florentine entretenait des liens étroits avec l’Église, souvent, les mêmes personnes faisaient partie des deux hiérarchies, l’une et l’autre se renforçant mutuellement. [3]. Faire partie d’un ordre était donc un aspect essentiel, une extension obligée de l’influence politique et socio-culturelle.

Il n’est donc pas étonnant de retrouver des crypto-Juifs grenouillant dans les réseaux inextricables de l’administration royale, de la bureaucratie civile et de l’Église. Pour ne citer que quelques exemples, Michael Baigent et Richard Leigh relèvent dans leur histoire de l’Inquisition:

En 1390 le rabbin de Burgos se convertissait au catholicisme. À la fin de sa vie il terminait évêque de Burgos, légat du Pape et tuteur d’un prince de sang. [Son fils deviendra un actif Converso comme on va le voir plus bas]. Il n’était pas le seul dans son cas. Dans les plus grandes villes, les municipalités étaient dominées par des familles de conversos. Au moment même de la formation de l’inquisition, le trésorier du roi Ferdinand était issu du milieu conversos. En Aragón, les cinq plus hauts postes de l’administration du royaume étaient occupés par des conversos.  En Castille, on comptait au moins quatre évêques conversos. Trois des secrétaires de la reine Isabelle étaient des conversos tout comme l’était le chroniqueur officiel de la Cour. [4]

Pour l’élite crypto-juive de cette Espagne moderne naissante, la fondation d’un puissant ordre religieux dirigé par un philosémite (si ce n’est d’un crypto-Juif de la bande), dont l’équipe dirigeante était composée essentiellement de conversos, qui dans ses statuts étaient ouverte aux candidatures conversos, représentait incontestablement une perspective alléchante. Qu’il existât une sorte de marché entre Loyola et ses parrains crypto-juifs, la nature de la constitution jésuite originelle, comme indiqué ci-dessus, le suggère, tout comme les premières correspondances au sujet de l’admission des candidats d’ascendance juive. La fondation de l’Ordre a coïncidé avec la montée généralisée en Espagne d’une atmosphère anticonversos qui a connu son paroxysme en 1547, «avec la promulgation par la plus haute autorité ecclésiale du pays, l’Inquisiteur général d’Espagne et archevêque de Tolède, Silíceo, de la législation sur la pureté du sang, El Estatuto de limpieza de sangre, (xx)». Le pape Paul IV et l’ancien élève de Silíceo, le rois Philippe II, ratifiaient les statuts de l’évêque en 1555 et 1556, respectivement, mais Ignatius de Loyola et son successeur converso, Diego Laínez (1512–1565), se dressaient vent debout contre les prétentions de l’Inquisiteur d’empêcher les conversos de se joindre aux jésuites. À  tel point que dans une lettre adressée au jésuite Francisco de Villanueva (1509–1557), Loyola écrivait «En aucun cas la Constitution jésuite n’intégrera la politique de l’archevêque» (xxi).

Cherchant à apaiser les tensions, Loyola dépêchait en février 1554 son émissaire plénipotentiaire, Jerónimo Nadal (1507– 1580), auprès de l’Inquisiteur. Nadal maintenait fermement que la constitution jésuite ne faisait pas de discrimination en fonction de la lignée des candidats et reconnaissait à titre personnel avoir admis des conversos durant son séjour dans la péninsule. Lors d’un débat tendu avec l’Inquisiteur au sujet de l’admission de l’un d’eux, Nadal répliquait: «Nous autres [Jésuites] avons plaisir à accueillir ceux d’ascendance juive». Ce qui est frappant, c’est de voir comme on peut reconnaître en l’occurrence un schéma qui deviendra classique: des arguments pro conversos [pro migrants] défendus par des crypto-Juifs qui prétendaient être des Espagnols de souche. Maryks note au passage que ses recherches historiques montrent que Nadal «était plus que probablement un descendant de Juifs Majorquins» (77).

À l’époque où Nadal jouait les intercesseurs auprès de l’Inquisiteur, les pratiques judaïques visant à changer de l’intérieur les conceptions que les chrétiens avaient d’eux étaient déjà courantes. Un parfait exemple en est l’ouvrage d’Alonso de Santa María de Cartagena (1384–1456) — Defensorium unitatis christianae [En défense de l’unité ce la chrétienté] (1449–1450). Alonso de Cartagena avait reçu le baptême (à l’âge de cinq ou six ans) de son père, Shlomo ha-Levi, ex grand rabbin de Burgos, devenu Pablo de Santa María (c. 1351–1435) suite à sa conversion juste avant les émeutes antisémites de 1391, il sera élu évêque de Cartagena (1402) puis de Burgos (1415). Le fait que sa femme restée juive n’ait pas été une gêne pour sa carrière épiscopale est pour le moins intéressant à noter.

Son fils Cartagena, donc, comme bien d’autres conversos, suivait à l’université de Salamanque des études de droit et de droit canon qui lui ont ouvert une carrière prestigieuse à la croisée des sphères royales, civiles et religieuses. Il a été Nonce apostolique et chanoine à Burgos. Le roi Juan II en fit son envoyé spécial au concile de Bâle (1434 – 1439), au cours duquel il participa à la rédaction d’un décret sur «le caractère régénérateur du baptême sans considération de race». (4). Toutefois, comme d’autres exemples de propagande conversos, Cartagena dans ses arguments allait au-delà d’un simple appel à la «tolérance». Selon lui, «la foi apparaît dans toute sa splendeur dans la chair israélite», les Juifs possèdent une «noblesse innée» et c’est aux rustres Espagnols de prendre exemple sur leur complexion pétrie «d’exquise urbanité». (14, 17)

C’est ainsi que dans les écrits des premiers crypto-Juifs, les Conversos ressortent comme supérieurs aux chrétiens ordinaires, plus aptes à se voir confier les charges de responsabilités (et le statut qui va avec), loin de mériter l’opprobre et l’hostilité dont ils sont l’objet, ils sont les seuls sans taches, innocents et doux comme des agneaux. On est frappé de la similarité avec les  arguments qu’on connaît à notre époque, surtout si on considère que pour Cartagena, l’antisémitisme ne tient qu’à la «malveillance des envieux».  (20)

À  l’encontre de tout ce verbiage apologétique, Maryks démontre – intentionnellement ou non – que l’Ordre des Jésuite à ses débuts n’était qu’une courroie de transmission de l’influence politique et idéologique des conversos. Loyola en était littéralement entouré en permanence, tout au long de son «règne». (55). C’est par exemple à un fils de Juif Portugais Enrique Enríques, qu’on doit en 1591 le premier manuel jésuite de morale et de théologie, Theologiae moralis summa. (65) Pour Maryks, la confiance de Loyola dans les aspirants d’origine juive était sans limite, il cite le cas de l’admission en 1551 de Giovanni Battista Eliano (Romano), petit-fils du célèbre grammairien et poète le rabbin Elijah Levita (1468–1549) …. «Il est entrée dans la Compagnie à l’âge de 21 ans, trois mois seulement après son baptême». (66)

Avec tout l’étalage que Maryks fait du laxisme bienveillant de Loyola envers les candidats conversos et de l’envahissement de l’Ordre par les crypto-Juifs que cela signifiait, il est étrange qu’il ne défende pas plus l’idée que la fondation des Jésuites résultait d’un marchandage avec l’élite des conversos, lui préférant une théorie basée sur une «confiance» dont on ne comprend pas très bien l’origine. C’est malheureusement souvent le cas avec l’historiographie juive, les faits et les conclusions d’un même texte se situant sur des trajectoires inverses. Dans la même veine, son explication selon laquelle l’Ordre était inondé de crypto-Juifs parce que Loyola, avant de fonder sa Compagnie, avait un grand nombre de contacts dans les milieux des commerçants et des religieux conversos paraît relever d’une contextualisation plutôt sommaire et à côté de la plaque.

En dépit des plans soigneusement établis par Loyola et ses acolytes, 32 ans à peine après sa fondation, la Société de Jésus allait être soumise à un vent de fronde soufflant des profondeurs contre cette élite unilatéralement crypto-juive. Les traits de figure de cette révolte en font un cas d’école dans l’étude de la nature réactive de l’antisémitisme. Les chapitres deux et trois du livre dans lesquels Maryks raconte la façon dont deux groupes ethniques rivaux, se sont affronté pour l’avenir de l’Ordre de Jésus constituent un pur moment de bravoure. C’est vers la stratégie de contre-attaque des Européens que nous tournons maintenant notre attention.

L’Inquisition, une guerre raciale d’éviction, les combats souterrains chez les Jésuites en Espagne: la riposte

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

«Étant les enfants de ce monde, hautains, rusés, fourbes, égoïstes, etc., il est certain qu’ils convenaient aussi peu que possible à la vie religieuse et qu’on ne pouvait plus rester ensemble. Si ceux de ce sang sont faits supérieurs [de l’Ordre], ils utilisent presque tout leur pouvoir à des choses externes: ils promeuvent très peu la mortification et les saines vertus, ils ont l’air de marchands, ils cherchent les premières places et aiment se faire appeler rabbin; ils ne sont guère désireux de rechercher la perfection décrite dans les parties 5 et 6 des Constitutions; ils laissent facilement entrer des personnes indignes pourvu qu’elles soient de leur sang».

Manuel Rodrigues, curie jésuite de Rome.

Les griefs des Espagnols de souche de la Compagnie de Jésus à l’encontre de l’élite crypto-juive présentent une remarquable uniformité. Ce qui prédomine dans leurs préoccupations, c’est la tendance des Juifs à l’accaparement du pouvoir, au népotisme, à l’arrogance, à l’ambition effrénée, et cet air de désinvolture dans la pratique du christianisme. Le comble aux yeux des plaignants, c’est que la branche espagnole de l’ordre était en train de devenir une caisse de résonance de l’influence juive qui s’étendait ainsi jusqu’à toucher le saint des saints au cœur de Rome.

La citation de Manuel Rodrigues en épigraphe reprend l’ensemble de ces thèmes, certains d’entre eux ayant reçu une ample confirmation empirique. Déjà, rien que le corpus de recherche constitué par Maryks et présenté dans la première partie suffirait à étayer l’accusation selon laquelle les crypto-Juifs «laissent facilement entrer les personnes de leur sang». Il y aussi ce Benedetto Palmio, un Italien secrétaire de deux supérieurs généraux Européens de l’Ordre (Francisco de Borja et Everard Mercurian), qui se plaint de «la prolifération et de l’insolence des néophytes Espagnols» qu’il juge «pestilentielle» (133). Enfonçant le clou, il ajoute «partout où on tombe sur un nouveau chrétien, il est impossible d’avoir la paix … ceux qui sont envoyés à Rome sont presque tous des néophytes et ce ne sont pratiquement que ce genre de personne qui sont admises en Espagne». (133) C’est ainsi que Philippe II d’Espagne vers 1570 en est venu à parler des Jésuites comme d’une «véritable synagogue». (133)

L’autorité crypto-juive était jugée particulièrement despotique par Palmio, à Rome, disait-il, «ils ne se comportaient pas en frères mais en maîtres»(135). Dans la droite ligne de leur sempiternelle solidarité ethnique, il y avait de fortes disparités dans les promotions vers les hautes fonctions, d’après Palmio «les néophytes voulaient dominer partout et c’est pourquoi l’Ordre était en permanence traversé de tempête de discorde et d’acrimonie».  (138). Les conversos étaient «dévorés par l’ambition, insolents, prétentieux, despotiques, fourbes, avide de pouvoir ils arboraient en permanence l’infâme masque de Janus». (142) Lorenzo Maggio, un Italien de la Curie jésuite de Rome, se plaignait de ce que «Les frères de la circoncision avaient perverti tout l’édifice de la Société [de Jésus]». (117)

Inconscient de la réalité des origines de l’Ordre de Jésus – dès le départ infesté de Juifs en quête d’influence politique, nombre d’Européens semblent avoir perçu la Société de Jésus comme un authentique mouvement religieux, qui partait d’un pieux sentiment mais qui avait été progressivement corrompu par l’infiltration de crypto-Juifs avides de pouvoir. Il est d’ailleurs important de comprendre qu’une telle perception n’était pas propre à la Société de Jésus. À peu près au même moment où l’agitation se développait au sein de l’Ordre, l’évêque Diego de Simancas de Zamora exhortait ses paroissiens à se défier des machinations des conversos et à combattre leurs manœuvres «destinées à leurrer le Pape et ses ministres». (31). Il concluait comme Rodrigues, Palmio, et Hoffaeus, que les conversos étaient volontiers «ambitieux, conspirateurs et avides de pouvoir» comme en témoignait le fait «qu’ils avaient accaparé tous les postes importants de l’ Église de Tolède». (34–5)

Pour combattre le népotisme des crypto-Juifs et leur solidarité ethnique sans failles, les Jésuites Européens – c’est passionnant à observer –  ont eu recours à des stratégies tout à fait symétriques. Ici encore, le modèle qui se dégage de la nature réactive de l’antisémitisme peut être replacé dans la perspective des analyses du Separation and Its Discontents de Kevin MacDonald, en particulier du chapitre clé dans lequel il voit le National Socialisme comme une stratégie miroir. En l’occurrence, dans les débuts de leur mouvement de révolte, les Jésuites Européens n’ont rien fait d’autres, que de créer leurs propres réseaux souterrains, également animés de la même volonté d’éviction raciale en faveur de leur ethnie propre.

Le rideau s’est levé sur la scène de la confrontation en 1572, à la mort du troisième supérieur général, Francisco de Borja. Jusqu’à cette date, les Européens ont souffert en silence la direction philosémitique de Loyola puis le népotisme rampant du converso  Diego Laínez. Borja lui-même était réputé pour sa protection des conversos alors que les tensions étaient en train de s’exacerber (115). La mort de Borja a déclenché une crise ouverte, tant sa succession apparaissait jouée d’avance par l’élite crypto-juive en faveur du converso Juan Alphonse de Polanco (xxv). Polanco avait déjà été nommé secrétaire de la Société par Loyola en 1547 avant de devenir doyen de la curie générale de Rome. Rompu aux jeux d’influence, «plus éminente figure de la Société de Jésus» sa sélection n’aurait dû être qu’une formalité. Mais comme l’explique Maryks, à cette date «un fort courant anti-converso [principalement composé de représentants Jésuites hors d’Espagne] avait pris pied dans la Société». (xxv)

En dépit d’une présence significative des pro converso à la Congrégation Générale [ = la plus haute instance législative de la Société de Jésus, elle est composée des délégués à la tête des diverses provinces et de représentants locaux élus], un bloc Italo-Portugais gagnait du terrain au sein de l’assemblée et s’est montré assez habile pour contrer l’élection de Polanco et défaire son parti de conversos. (120)

En plus de la formation d’un bloc sur un principe ethnique, la stratégie de riposte s’inspirait à nouveau des tactiques crypto-juives en faisant appel au sommet, au Pape. La délégation portugaise emmenée par Leão Henriques «emportait en grand secret à Rome une lettre datée du 22 janvier 1573 du pénitent d’Henriques, le Cardinal Infant Henry du Portugal (1512– 1580), qui s’adressait au pape Grégoire XIII.  Dans cette lettre, le Grand Inquisiteur du Portugal et futur roi (1578– 1580) demandait que ni un converso ni un pro converso soit élu Supérieur Général de la Société de Jésus, la lettre mettait en outre en garde que si rien n’était fait contre le péril converso, la Société courait à sa perte». (121)

Grégoire XIII ne tarda pas à dévoiler son soutien en faveur d’une alternative non espagnole à Polanco, lequel, à son tour, indiqua qu’il acceptait de démissionner mais qu’il refusait d’interdire à d’autres candidats «Espagnols» de se présenter à cette élection. À l’ouverture de la congrégation, Grégoire XIII s’enquit des procédures, du nombre d’Espagnols parmi les votants, et de l’origine nationale des précédents supérieurs généraux. Le pape «fit remarquer que quelqu’un devait être pris en dehors de la délégation espagnole», et, en dépit des protestations élevées par Polanco contre la limitation de la liberté de conscience des électeurs, il suggéra spécifiquement le nom du Wallon Éverard Mercurian, puis pris congé de la congrégation avec une bénédiction. (122) En conséquence, «même si ce fut le converso Antonio Possevino qui eut l’honneur de prononcer le discours d’ouverture, ce discours tomba à plat, le Cardinal Gallio de Côme arrivant et informant benoîtement la congrégation qu’il était là pour représenter la volonté du Pape d’empêcher l’élection d’un candidat Espagnol». (122) Le lendemain, l’assemblée choisissait pour être son prochain Supérieur Général, dès le premier tour et à une majorité de 27 voix, Éverard Mercurian.

À peine entré en fonction, Mercurian procédait, selon ses propres termes, «au grand ménage de la maison». Il éloignait de Rome (et sans doute d’Italie ou même d’Europe) nombre de jésuites conversos». (123) Polanco, après presque 30 ans passés au sommet du pouvoir, «se retrouvait expédié en Sicile, une mesure jugée trop sévère même par son principal ennemi, Benedetto Palmio». (123)

Mais ce nettoyage ne s’est pas fait sans ultimes répliques telluriques, notamment sur la plaque espagnole de la Société de Jésus, un nouveau mouvement y voyait le jour: les memorialistas ou mémorialistes. Le groupe tire son nom de «mémoire» au masculin, terme qui désigne à l’époque un genre littéraire dans lequel un exposé des faits est suivi d’une pétition adressée à l’autorité royale ou religieuse. Les memorialistas se sont fait un nom en envoyant «des mémoires secrets à la Cour d’Espagne, à l’Inquisition et au Saint-Siège pour demander la réforme de l’Ordre jésuite et en particulier qu’une autonomie soit accordée aux provinces espagnoles». (125–6) Ces mémoires se voulaient très subversifs, cherchant à provoquer la scission de la Société et permettre aux conversos de récupérer leur base de pouvoir en Espagne.

Mais il ne s’agissait au fond que d’un combat d’arrière-garde de l’élite crypto-juive. Chassés de Rome et tenus en méfiance par les Portugais, le but était pour les conversos de limiter les dégâts en tentant de préserver leur pouvoir en Espagne et de prévenir d’autres assauts contre leurs positions tenues de longue date. Comme dit Maryks «il faut reconnaître que la plupart d’entre eux [des mémorialistes] avaient une origine converso». (125) Les mémorialistes étaient clairement perçu par leurs contemporains comme un mouvement de revanche juif et Maryks n’y trouve rien à redire. L’un de leurs principaux chefs de file était Dionisio Vázquez, un converso, et Maryks de remarquer: «on peut estimer que le rôle actif de Vázquez’s au sein des memorialistas est une sorte de vengeance contre la politique discriminatoire de Mercurian». (126) Le très anti-converso Benedetto Palmio n’a quant à lui «jamais douté que les conversos étaient derrière ce mouvement revanchard». (128)

Tandis que la lutte se prolongeait, en 1581 un autre anti-converso était élu en succession de Mercurian, l’Italien Claudio Acquaviva. Acquaviva nommait un certain nombre d’anti-converso d’envergure à des postes clés à Rome (dont Manuel Rodrigues, Lorenzo Maggio, et le Rhénan Paul Hoffaeus), les chargeant d’étendre les mesures de Mercurian au-delà du cercle de Rome et de viser l’ensemble du réseau Jésuite. Maryks écrit que le travail de longue haleine d’Hoffaeus, de Maggio, et de Rodrigues, «a effectivement conduit à une diminution graduelle des entrées dans la Société des candidats d’ascendance juive». (146)

Mais il est intéressant de voir comme toutes ces activités se sont déroulé de manière feutrée, dans le secret des coulisses, les aspects ethniques de la lutte étant toujours savamment occultés, de nouveau à l’image des stratégies des conversos lorsqu’ils cherchaient à étendre leur influence. Par exemple, en 1590 Acquaviva envoyait des «instructions confidentielles» aux provinces espagnoles dirigées par des Jésuites Européens – ou «vrais chrétiens» – dans lesquelles il insistait sur la nécessité de la discrétion:

En ce qui concerne les charges de direction, nous devons nous garder de confier à ces gens [les conversos] les postes clés… En ce qui concerne les admissions, en revanche, il ne s’agit pas de provoquer l’amertume de beaucoup dans la Société et éviter en conséquence une interdiction trop systématique des entrées aux gens affublés de cette sorte de tare. Il faut faire preuve de plus de doigté et de discernement dans les admissions.… En tout état de cause, [les enquêtes généalogiques] doivent se faire dans la discrétion, et si quelqu’un doit être exclu, il serait bon de fournir certaines justifications opportunes afin qu’on ne puisse pas affirmer avec certitude que la personne a été refusée en raison de sa lignée. (147).

Confronté à une sourde hostilité interne des Jésuites espagnols, Acquaviva durcissait encore sa position avec un nouveau décret quelques années plus tard disant que:

Ils s’avèrent que ceux qui descendent de parents récemment christianisés sont une source permanente de problèmes et de difficultés de tous ordres pour la Société (ainsi qu’en témoigne notre expérience quotidienne)… L’ensemble de la congrégation décide par le présent décret qu’en aucun cas une personne de cette sorte, c’est-à-dire de souche hébraïque ou sarrasine, ne pourra dorénavant être admise dans la Société. Et si par erreur une telle personne était admise, elle devrait être renvoyée aussitôt le manquement connu, sans attendre la prochaine profession, après en avoir avisé le Supérieur Général et attendu sa réponse. (149)

Maryks estime que c’est à ce stade que «la saison de la chasse aux origines s’ouvre» et que «le renvoi systématique des personnes d’ascendance juive de la Société de Jésus débute pour de bon».

Aux Sources de l’Apologétique Juive Moderne

Marginalisés la défaite consommée, l’élite crypto-juive n’a guère eu d’autres ressources que de se rabattre sur une longue série de mémoires qui par bien des aspects ne sont pas sans rappeler la propagande moderne distillée par leurs officines les plus en vue comme l’ADL. Comme je l’ai noté dans un précédent essai, on retrouve par exemple la ficelle dialectique grossière qui consiste à déplacer «l’altérité» de la judéité dans la société hôte sur le mouvement nationaliste qui s’oppose à eux [ = l’antisémitisme n’est pas français]:

[…] Kevin MacDonald nous rappelle que «les organisations juives d’Allemagne durant la période 1870 -1914 [celle des antisemitismusstreit] soutenaient que l’antisémitisme était une menace pour l’ensemble de l’Allemagne parce qu’il était fondamentalement non-germanique. [1] À l’époque en Allemagne, l’antisémitisme était dénoncé par les Juifs comme étant d’importation française.

Inversement, Paula Hyman constate que confronté à la montée de l’antisémitisme en France à la même époque [affaire Dreyfus] les Juifs propageaient le message selon lequel l’antisémitisme n’avait rien de français et qu’il était d’importation allemande. [2]

Thorsten Wagner rapporte que le couplet était également classique au Danemark: «une importation allemande qui ne saurait avoir aucune racine dans la tradition locale».[3]

Mais la ficelle était déjà utilisée par les mémorialistes conversos, prenons le cas d’Antonio Possevino, un diplomate de haut rang débarqué par Mercurian et exilé en Suède: depuis les contrées septentrionales glacées, il prenait la plume sur des pages et des pages pour dire que c’était des figures comme Benedetto Palmio qui étaient réellement non chrétiennes – pour ne pas dire franchement païennes. (164–5) Poussant plus loin la chutzpah, Possevino allait jusqu’à attribuer les dissensions internes de la Société de Jésus à «l’ambition démesurée des Jésuites Portugais». (171–2) Alors qu’il était bien placé pour savoir à quoi s’en tenir, il mentait effrontément dans sa prose sur la nature des mémorialistes, insinuant que le mouvement était une «conspiration portugaise pour miner l’unité jésuite». (171–2). Maryks renvoie Possevino dans les cordes, constatant simplement que la majorité des mémorialistes étaient en réalité «indéniablement des conversos». (172)

Enfin, l’apologétique de Possevino préfigure la propagande moderne par un autre aspect:  la conviction que les Juifs ont une vocation naturelle à constituer l’élite morale et à s’imposer à des masses rurales jugées méprisables. Il s’en prend aux «envieux sans talent des milieux ruraux» (168) qui sèment la discorde contre les conversos «qui par leur vertu et leur  dévouement représentent pourtant l’élite de la Société de Jésus». (172)

Andrew Joyce

Traduction Francis Goumain.

Source

Review: The Jesuit Order as a Synagogue of Jews – Part One – The Occidental Observer

et

Review: The Jesuit Order as a Synagogue of Jews — Part Two – The Occidental Observer

On peut aussi télécharger le livre de Maryks gratuitement.

Note partie I

[1] See Kevin Ingram, Secret lives, public lies: The conversos and socio-religious non-conformism in the Spanish Golden Age. Ph.D. Thesis (San Diego: University of California, 2006), pp. 87–8.

[2] Quoted in Maryks, The Jesuit Order as a Synagogue of Jews, p.xx.

[3] W. Caferro, Contesting the Renaissance (Oxford:Wiley-Blackwell, 2010), p.158.

[4] M. Baigent & R. Leigh, The Inquisition (London: Viking Press, 1999), pp.75-6.

Note partie II

[1] K. MacDonald, Separation and Its Discontents: Toward and Evolutionary Theory of Anti-Semitism (1st Books, 2004), 232.

[2] A. Lindemann & R. Levy (eds.), Antisemitism: A History (Oxford University Press, 2010), 136.

[3] T. Wagner,’Belated Heroism: The Danish Lutheran Church and the Jews, 1918-1945,’ in K. Spicer (ed), Antisemitism, Christian Ambivalence, and the Holocaust (Indiana University Press, 2007), 7.

 

Le rôle des intellectuels juifs dans la réforme des lois de l’immigration aux États-Unis

Kevin MacDonald

Department of Psychology, California State University–Long Beach, Long Beach, CA, USA

                                        ……

En bref:

Le rôle de l’activisme juif dans les bouleversements qui se sont produits en Occident au cours des dernières décennies continue d’être controversé. Je réponds ici à plusieurs questions réputées liées à l’influence juive, en particulier «l’hypothèse par défaut» selon laquelle le QI et la concentration dans les zones urbaines expliquent l’influence et le rôle de la communauté juive dans la promulgation de la loi sur l’immigration de 1965 aux USA.

L’ère nouvelle qui s’est ouverte après la Seconde Guerre mondiale a vu l’émergence en Amérique d’une élite essentiellement juive qui a exercé une influence sur tout un faisceau de questions convergentes telles que l’immigration, les droits civiques et la sécularisation de la culture américaine permettant de dégager un consensus quasi unanime là où on s’y serait attendu le moins.

L’activisme juif dans le mouvement pro immigration était tous azimuts, allant des mouvements intellectuels niant l’importance de la race dans les affaires humaines au recrutement et au financement des organisations antirestrictionnistes; il s’agissait, en exerçant une influence dominante sur le Congrès et l’exécutif de faire tomber l’objectif d’un statu quo ethnique jugé trop favorable au maintien d’une société blanche relativement homogène.

Mots-clés: influence juive – loi d’immigration de 1965 – Ethnocentrisme – Antisémitisme

[NdT: le début de l’article est sauté pour arriver le plus vite possible au sujet principal, le rôle l’intelligentsia juive dans l’ouverture des vannes de l’immigration et du métissage dont voici l’historique:

1900 – Naissance de l’anthropologie antiraciste boasienne, auteur Franz Boas, un Juif ashkénaze né en Allemagne et parti aux USA: ses émules seront en majorité Juifs.

1924 – Première loi restrictive sur l’immigration, elle repose sur un principe de quotas proportionnels au poids des ethnies déjà en place, le but de la loi est de maintenir le statu quo ethnique à prédominance blanche, les Juifs sont contre ce système qui bloque à la fois le niveau de l’immigration et sa composition ethnique.

1952 – Instauration de la PCiN, commission présidentielle sur la naturalisation et l’immigration, instaurée par Truman, les Juifs y prédominent, le but est clairement de faire sauter le système des quotas et donc le statu quo ethnique, le danger se précise.

1952 – Deuxième loi, toujours d’inspiration restrictive: le système des quotas s’ouvre à d’autres pays, mais les quotas sont limités, et le système lui-même est préservé, victoire d’arrière-garde des restrictionnistes.

1958 – Kennedy publie son livre A Nation of Immigrants – le livre est en réalité écrit par un Myer Feldman, un intellectuel juif.

1961 – Première grave entorse au système des quotas, le regroupement familial (family unification en américain), le regroupement familial marche même si le quota est déjà atteint, de plus, il est en cascade: un proche fait venir un proche qui fait venir un proche …

1965 –  Le système des quotas tombe, il n’y a plus qu’un quota global, régi par le principe du premier arrivé, premier servi.]

1 – La montée d’une élite essentiellement juive dans l’Amérique d’après-guerre et son influence sur la politique d’immigration.

Concernant l’anthropologie Boasienne, comme le faisait remarquer Gelya Frank (1997: 731), «La prépondérance des intellectuels Juifs dans les premières années de l’anthropologie boasienne, puis parmi les anthropologues des générations suivantes, a été constamment occulté par l’histoire officielle de la discipline». Boas et ses étudiants en majorité Juifs sont à l’origine des théories anti-raciales et de leur emprise dominante sur les campus des universités américaines. En 1919, Boas pouvait affirmer que désormais «la plupart des recherches anthropologiques contemporaines menées aux États-Unis étaient le fait de ses étudiants de l’université Columbia» (in Stocking, 1968:296). De fait, à partir de 1926, tous les grands départements d’anthropologie étaient tenus par des émules de Boas, la grande majorité d’entre eux étant Juifs.

2 – L’identité Juive à la poursuite de ses intérêts propres

L’analyse de l’influence juive passe nécessairement par la reconnaissance d’une identité juive à la poursuite de ses intérêts propres comme principe moteur de ses courants  et organisations.

Voici par exemple un petit échantillon des vues de Freud au sujet de l’identité juive comme  source du courant psychanalytique (Kevin MacDonald – Culture of Critic [CofC]:111). Dans une lettre de 1931, il se décrivait comme «passionnément – fanatiquement – Juif». Ailleurs, il écrit qu’il trouve «l’attraction du judaïsme et des Juifs proprement irrésistible avec toutes ses puissances obscures, d’autant plus puissantes qu’elles ne se laissent pas saisir par des mots. Il évoque les «pulsions inavouables liées à son identité et la forte conscience d’une identité intérieure secrètement partagée» (in Gay, 1988: 601).

…  Gay (1988: 601) pense que Freud était animé d’une croyance selon laquelle son identité résultait de son héritage phylogénétique [formée au cours de l’histoire vue comme un processus interne lamarckien – et non simplement parce que les autres le considéraient comme Juif] … Freud et ses condisciples avaient le sentiment d’une proximité raciale entre eux et d’une altérité radicale avec les non-Juifs (Klein, 1981: 142; voir aussi Gilman, 1993: 12f).

Il me semble que tout ceci témoigne bien de sa judéïté. Concernant son sens de l’intérêt juif, Freud faisait part de ses espoirs messianiques de voir se concrétiser un jour une «compréhension entre les Juifs et les antisémites sur la base de la psychanalyse» (in Gay, 1988: 231), une citation qui montre à l’évidence que la psychanalyse était vue par son fondateur comme un moyen de mettre un terme final à l’antisémitisme. Ce genre de considérations messianiques était courant chez les Juifs de cette Vienne fin de siècle qui cherchaient à faire advenir un monde «supranational et supra ethnique» (Klein, 1981: 29). Ces intellectuels «maquillaient ainsi souvent sous les traits d’un humanitarisme universel leur propre conception selon laquelle les Juifs étaient responsables du sort de l’humanité au XXe siècle» (Ibid.: 31).

3 –  Mariage Mixte [FG: passage sauté, il s’agit de faire remarquer que les Juifs évitent le mariage mixte plus que n’importe quelle autre ethnie aux USA, on sait d’ailleurs qu’il est légalement découragé en Israël, voir Israël, lois de citoyenneté et de protection du sang]

4 – Hypocrisie juive?

Naturellement, chacun comprendra que ces généreux principes universels sont susceptibles d’adaptation bien comprise au contexte et qu’il ne peut être question de les appliquer sans égard pour les éventuelles conséquences. L’ADL [Anti-Defamation League = assiciation juive équivalent de la Licra]  a ainsi récemment condamné Tucker Carlson, une personnalité du monde des médias américains, pour avoir évoqué le fait que les électeurs américains étaient remplacés par des immigrés, jugeant que ces propos relevaient «d’une position suprématiste selon laquelle la race blanche serait mise en danger par une marée inexorable de non blanc, une position particulièrement raciste, antisémite et toxique» (voir Moore, 2021). Carlson répliqua à brûle-pourpoint en dénonçant l’attitude de l’ADL sur le conflit israélo-palestinien et l’éventuelle solution à un seul État. Là comme par hasard, il est apparu de simple bon sens à l’ADL de déclarer que compte tenu des réalités présentes et du passif des antagonismes historiques, une solution à un État était  vouée à l’échec. Avec une natalité prolifique chez les Palestiniens, ajoutée à un éventuel retour des réfugiés et de leur descendance éparpillée dans le monde, les Juifs seraient rapidement mis en minorité dans leur propre pays, dans une telle situation, ils deviendraient politiquement – voire, physiquement – vulnérables. Il n’est donc pas réaliste et acceptable de s’attendre à ce que l’État d’Israël subvertisse de lui-même sa souveraineté et son identité sur son propre sol (ADL, n.d).

Étant donnée la longue histoire des tensions raciales en Amérique, la recrudescence actuelle des violences interraciales, la prééminence de courants de pensée critiques de la théorie des races qui passent leur temps à pathologiser les blancs dans les médias et le système éducatif, (DiAngelo, 2018; Kendi, 2019), il pourrait pourtant paraître tout aussi raisonnable de penser que la population blanche est également en train de devenir une minorité vulnérable.

5 – Le rôle des Juifs dans l’élaboration de la politique migratoire U.S.

L’objet principal de la CofC [Culture of Critique = la trilogie de Kevin MacDonald], c’est l’éclosion durant les premières années de l’ère qui s’est ouverte avec la fin de la Seconde Guerre mondiale d’une nouvelle élite de centre-gauche, essentiellement juive, qui investit progressivement tout le champ médiatique, universitaire et politique — ce dernier n’étant pas seulement influencé par les deux premiers, mais aussi par les largesses d’une puissance financière juive à son apogée. La destitution de l’ancienne élite White Anglo-Saxon Protestant (WASP) est un thème traité par Eric Kaufmann dans The Rise and Fall of Anglo-America (2004) (critiqué par MacDonald, 2015–16), et également traité par David Hollinger (1996: 4) dans une note sur «the transformation of the ethnoreligious demography of American academic life by Jews in the period from the 1930s to the 1960s» (la transformation de la démographie ethno-religieuse de la vie universitaire américaine par les Juifs de 1930 à 1960) et dans une note sur le poids de l’influence juive sur la tendance à la sécularisation de la société américaine et sur son évolution vers un idéal cosmopolite (11); Hollinger (1996: 160) souligne que «l’un des protagonistes majeurs de cette guerre culturelle qui faisait rage dans les années 40, c’était une intelligentsia sécularisée, essentiellement juive, résolument de centre-gauche, solidement retranchée dans les départements de philosophie et des sciences sociales».

Lipset et Ladd (1971), se fondant sur les données d’une enquête de 1969 portant sur 60 000 universitaires montrent que les années 60 auront été une période décisive qui a vu la montée d’une élite juive sur les campus des plus prestigieux établissements, une élite bien plus marquée à gauche que le reste des professeurs [non-Juifs]. Les Juifs représentaient environ 12 % des professeurs en général, mais environ 25 % des professeurs les plus jeunes (moins de 50 ans) dans les universités de l’Ivy League, des pourcentages bien plus élevés qu’au cours des décennies précédentes. De plus, ils étaient 75% à se déclarer de gauche ou «liberal» contre 40% pour les professeurs non-Juifs. Les professeurs Juifs approuvaient à une large majorité (59,1 %) l’activisme radical des étudiants des années 60, ils n’étaient que 40% chez les professeurs non-Juifs. Les universitaires Juifs étaient également plus susceptibles d’être en faveur d’un assouplissement des critères de sélection pour ouvrir l’université aux professeurs et étudiants des minorités.

Les universitaires Juifs étaient aussi plus largement publiés que les autres, dénotant une plus grande influence. Ce point est particulièrement important quand on sait que l’université est une institution fortement hiérarchisée: ceux qui tiennent le haut du pavé forment la génération suivante et ont la haute main sur la sélection des nouveaux professeurs (MacDonald, 2010). Par exemple, Herskovits (1953: 23) notait que «les quarante années sous la férule de Franz Boas à l’université Columbia ont assuré une continuité dans l’enseignement qui lui a permis de former une cohorte d’étudiants qui ont constitué le noyau dur de l’anthropologie américaine, lesquels, parvenus à maturité, ont dirigé tous les grands départements de leur discipline. À leur tour, ils ont formé des étudiants … qui ont continué d’essaimer dans la même veine.

CofC décrit en détail les composantes les plus significatives de cette nouvelle élite intellectuelle et universitaire de centre-gauche. L’analyse de la montée en puissance d’une telle vague ne peut pas se limiter à une seule question – fût-ce la politique d’immigration, cette vague affecte tout un ensemble de questions convergentes d’importance vitale pour les politiques publiques et qui ne peuvent être abordées séparément telles que: les droits civiques des Africains-Américains, les droits des femmes, la religion dans l’espace public (Cf.Hollinger secularization of American society), la légitimité de l’identité raciale blanche et de ses intérêts, le cosmopolitisme, la politique étrangère au Moyen-Orient et bien d’autres sujets encore en plus de l’immigration.

En réalité, toutes ces questions tournent autour d’un point central, la race, ont un cadre de discussion, la scène médiatique et universitaire et vont déboucher sur une victoire sans partage avec la promulgation des droits civiques en 1964 et les lois libérales sur l’immigration de 1965.

CofC retrace le rôle des intellectuels Juifs dans le radical changement de marée des opinions académiques liées à la race (Ch. 2) et la manière dont l’idéologie boasienne est devenue dominante dans les débats du Congrès de 1965 sur l’immigration (Ch. 7); comme indiqué ci-dessous, c’est au cours de cette période clé que cette idéologie raciale est devenue dominante dans les médias (Andrew Joyce, 2019)  –  à une époque où toutes les chaînes de télévision et les studios hollywoodiens appartenaient aux Juifs, marquant un tournant à 180 degrés par rapport à ce qui s’était passé dans les années 1920 qui avaient au contraire vu la victoire des arguments restrictionnistes basés sur la race, ces arguments étant alors portés et défendus par les magazines de premier plan et dans les livres grand public.

De la même façon, l’influence juive a été déterminante dans le mouvement des droits civiques durant les années critiques 1954-1968 (voir ci-dessous) et dans la sécularisation de la culture américaine: «Les organisations juives de défense des droits civiques ont eu un rôle historique dans les évolutions législatives et sur la politique de l’exécutif d’après-guerre» (Ivers, 1995: 2).

La seule chose qui pourrait sérieusement venir remettre en cause un pan important de ce que Cofnas [qui est Juif] appelle «le narratif antijuif», c’est tout ce qui concerne le rôle des Juifs dans la réorientation des lois d’immigration américaines. Il est tout à fait logique et légitime pour Cofnas, à la suite Hugh Davis Graham (2003), de replacer ces lois dans un contexte plus large, mais, comme indiqué ci-dessus et développé ci-dessous, ce contexte a tout autant été influencé par l’activisme juif. C’est d’ailleurs bien la thèse défendue par Graham (2003: 57) qui déclare: «La réforme de l’immigration n’est jamais que l’aboutissement d’un travail de longue haleine qui remonte aux années vingt de la part des organisations juives qui se sont constamment opposées à la logique des quotas ethniques …  Les responsables politiques Juifs de New York, en particulier le gouverneur Herbert Lehman, ont fait œuvre de  pionniers dans les années 1940 en faisant adopter par leur État une législation antidiscrimination sur un point crucial [en raison des dispositions sur les origines nationales de la loi de 1924 donnant la préférence à l’immigration en provenance du nord-ouest de l’Europe], en ajoutant «l’origine nationale» à la race, la couleur et la religion à la liste des motifs de discrimination inadmissibles».

De même, Otis Graham (2004) notait que «le noyau politique de la nébuleuse en faveur d’un assouplissement du régime d’immigration était composé de lobbyistes ethniques… prétendant parler au nom de toutes les nationalités qui avaient migré avant la loi sur les origines nationales de 1924, ce noyau était en réalité dominé par des Juifs d’Europe centrale et orientale, profondément inquiets de la montée du fascisme et de l’antisémitisme sur le continent et en quête permanente d’un refuge sûr» (voir aussi Graham, 2004: 67).

Ainsi, toute critique du travail de MacDonald sur l’immigration (CofC: Ch. 7) doit considérer si les Juifs ont eu ou non une influence importante sur le contexte élargi dont parle Graham (2003). Or, Cofnas ignore le rôle des intellectuels Juifs dans les bouleversements  des conceptions universitaires sur les races, il ignore la manière dont l’idéologie Boasienne est devenue dominante dans les débats au Congrès, il ignore toutes les pièces au dossier sur l’activisme juif en faveur de l’immigration entre 1890 et 1965 (CofC: 259–293), et il ignore tout de la synthèse de MacDonalds sur l’engagement des Juifs dans le mouvement pour les droits civiques des années cinquante et soixante (CofC: 255–258).

Justement, les pièces présentes dans  CofC sur l’activisme juif précédant la promulgation  de la loi sur l’immigration de 1924 ont été récemment corroborés par Daniel Okrent [un Juif]. La communauté des Juifs en provenance d’Allemagne, déjà installée en Amérique depuis un certain temps, malgré le dégoût que lui inspiraient ses propres cousins d’Europe méridionale et orientale, a joué un rôle majeur pour que la législation sur l’immigration leur reste favorable même alors que le grand public n’en voulait plus. C’est ainsi que le sénateur Henry Cabot Lodge, chef des restrictionnistes, a pu écrire à un ami durant la deuxième présidence de Grover Cleveland (1893-1897, 22e et 24e président des États-Unis): «Des influences [sur Grover Cleveland] ont été exercées hier que je vous expliquerai lors de notre rencontre et qui étaient très difficiles à déjouer»; il expliquait à un autre que «ces forces ne représentaient ni des entreprises ni des courants politiques (Cf. Okrent, 2019: 72). Pour Okrent il s’agissait «presque à coup sûr de membres de la riche et influente communauté juive en provenance d’Allemagne comme Jacob Schiff, lequel avait personnellement exprimé une demande à Grover Cleveland pour faire barrage au test d’alphabétisation» (Ibid). (Avant de se focaliser franchement sur les origines nationales, les restrictionnistes défendaient l’idée d’un test de langue comme moyen de juguler l’immigration). 

Un quart de siècle durant, l’IRL [Immigration Restriction League], avec à sa tête le sénateur Henry Cabot Lodge, a dû batailler pied à pied contre tout une série de puissantes organisations dominées par des riches Juifs d’Allemagne: «L’émergence dans les années 1890 de Juifs organisés, riches et largement pourvus en entregent qui avaient embrassé la cause des immigrants a représenté pour Lodge et ses partisans une opposition comme peu de Boston Brahmins avaient eu affaire jusque-là». (Okrent, 2019: 72, 73). [FG: Brahmanes de Boston = Super caste de Boston, héritière des premiers colons].

C’est sans doute en raison de cette opposition acharnée qu’il a fallu, en dépit d’une opinion publique qui se faisait de plus en plus pressante à partir de 1905, attendre les années vingt pour que l’immigration soit enfin régulée (Neuringer, 1971: 83).

Comme le rapporte Cohen (1972: 40f), les efforts de l’AJCommittee contre la restriction de l’immigration au début du XXe siècle constituent un exemple flagrant de la capacité des organisations juives à influencer les politiques publiques tout en ne constituant que l’infime couche supérieure de leur communauté.

De toutes les ethnies susceptibles d’être affectés par la législation sur l’immigration de 1907, ce sont les Juifs qui avaient le moins à gagner en termes de nombre d’immigrants potentiels, mais ce sont eux qui ont – et de loin – joué le plus grand rôle dans l’élaboration de la législation (Cohen, 1972: 41); les autres communautés d’immigrés n’étaient pas aussi organisées et revendicatives, ne serait-ce que parce que leur position sur le sujet était bien plus ambivalente (Neuringer, 1971: 83).

Dans la période qui a suivi et qui devait, suite à un nouvel assaut au Congrès des restrictionnistes qui n’avaient pas désarmé, déboucher sur la législation encore relativement inoffensive de 1917, «seuls les Juifs se sont mobilisés» (Cohen, 1972: 49).  

Il est important de bien comprendre que cette influence a joué alors que l’emprise juive n’avait encore rien à voir avec ce qu’elle sera après la Seconde Guerre mondiale et, a fortiori, avec ce qu’elle sera au moment des débats sur l’immigration des années 1960, époque à laquelle l’ancienne élite WASP n’était déjà plus que l’ombre d’elle-même, quasiment évincée par la nouvelle élite.

S’agissant de la bataille pour les droits civiques reconnue décisive par Hugh Davis Graham (2003) pour le passage des lois de 1965 sur l’immigration, l’activisme juif y a joué un rôle prépondérant. Durant la période qui a suivi la Seconde Guerre mondiale, c’est tout l’aréopage des organisations juives qui s’est mis en branle sur les questions afro-américaines, notamment l’AJCommittee, le Congrès juif américain (ci-après, AJCongress) et l’ADL. «Disposant d’un personnel professionnel, de bureaux parfaitement équipés, d’un savoir-faire éprouvé dans le domaine des relations publiques, elles avaient tout ce qu’il fallait pour faire la différence» (Friedman, 1995: 135). Au cours des années soixante, les associations de défense des droits civiques étaient financées aux deux tiers ou aux trois quarts par les Juifs (Kaufman, 1997: 110): «Leur soutien juridique et financier a été à l’origine de toute une série de victoires en faveur du mouvement des droits civiques». Il n’y a guère d’exagération dans les propos de cet avocat de l’AJCongress selon lesquels «La plupart de ces lois ont en fait été rédigées dans les locaux des agences juives, par des Juifs, mises à l’ordre du jour par des législateurs Juifs et votées sous la pression des électeurs Juifs» (Levering-Lewis, 1984: 94). » (CC : 256).

Il s’agissait d’un effort aux multiples facettes: contestation devant les tribunaux pour discrimination en matière de logement, de scolarité ou d’emploi public, propositions de loi en veillant à leur adoption par les organes législatifs et l’exécutif au niveau fédéral et au niveau des différents États, rédaction des messages à diffuser par les médias [voir aussi Joyce, 2019], programmes d’enseignement pour les étudiants et les professeurs, remodelage du discours universitaire. Comme souvent lorsque les Juifs font campagne sur les campus ou dans les instances politiques, la prépondérance de leur implication est masquée (par exemple, Svonkin, 1997: 45, 51, 65, 71-72). (CC : 257).

Couvrant la période de 1945 à 1965, les documents présentés dans CofC sont particulièrement édifiants quant à l’importance de l’activisme juif dans la création d’un contexte favorable à la remise en cause des dispositions de la loi de 1924 sur les origines nationales et dans le triomphe final du vote de la loi de 1965 qui ouvre les vannes de l’immigration (CC : 273–292). Je reprends ici brièvement ces documents en les organisant par thème et en les enrichissant des dernières recherches.

Remettre en cause les façons de penser sur les races

Les Juifs et leurs organisations ont été à la pointe du combat intellectuel visant à nier l’importance des différences raciales et ethniques dans les affaires humaines. Se plaçant dans la roue du succès de l’anthropologie boasienne qui dominait l’American Anthropological Association depuis les années 1920, ils vont façonner le contexte intellectuel qui va présider au succès de la loi de 1965 (CofC: Ch. 2; voir ci-dessus). De fait, «De par son message et de par son but, l’anthropologie boasienne était explicitement une science antiraciste» (Frank, 1997: 741).  

Comme John Higham (1984) le notait, l’ascendant pris par ces conceptions aura été capital dans la victoire finale contre le restrictionnisme. Commentant les débats de 1965, un journaliste du New York Times faisait remarquer que «les membres du Congrès ne voulaient pas avoir l’air de racistes» (dans Graham, 2004: 92).

Le nativisme avait été «dépouillé de sa respectabilité intellectuelle» (Bennett, 1995: 285). Il n’est donc pas surprenant que les idées boasiennes sur la race aient occupé une place importante dans les débats sur l’immigration entre 1945 et 1965.

Par exemple, dans une déclaration de 1951 au Congrès, l’AJCongress déclarait: «Les découvertes de la science doivent forcer même les plus bornés à admettre, comme ils le font de la loi de la gravité, que l’intelligence, la moralité et le caractère n’ont aucun rapport que ce soit à la géographie ou au lieu de naissance» (Déclaration de AJCongress, Joint Hearings Before the Subcommittees of the Committees on the Judiciary, 82nd Congress, 1st Sess., on S. 716, H.R. 2379, and H.R. 2816. 6 mars – 9 avril 1951, 391).

La déclaration se poursuivait par des citations de certains des écrits les plus connus de Boas et de son protégé, le professeur de Princeton, Ashley Montagu, sans doute l’opposant le plus en vue à l’époque du concept de race (Déclaration de l’ AJCongress, Joint Hearings Before the Subcommittees of the Committees on the Judiciary, 82nd Cong., 1st Sess., on S. 716, H.R. 2379, and H.R. 2816. 6 mars – 9 avril 1951, 402–403).

Montagu, dont le nom à l’origine était Israel Ehrenberg, se permettait de professer dans la période qui a immédiatement suivi la Seconde Guerre mondiale [au cours de laquelle 70 à 85 millions de personnes ont été tuées] que les humains sont naturellement coopératifs et dépourvus d’agressivité, qu’il existe une fraternité universelle entre eux (voir Shipman, 1994, 159f).

En 1952, Margaret Mead, autre protégée de Boas, témoignait devant la Commission présidentielle sur l’immigration et la naturalisation (ci-après PCIN) (1953: 92) que «tous les êtres humains dans toutes les sociétés ont les mêmes potentialités. … que les recherches anthropologiques les plus avancées démontrent que toutes les collectivités humaines présentent à peu près la même répartition de potentialités.

Un autre témoin déclarait que le conseil exécutif de l’American Anthropological Association avait approuvé à l’unanimité la proposition selon laquelle «toutes les preuves scientifiques indiquent que tous les peuples sont intrinsèquement capables d’acquérir ou de s’adapter à notre civilisation» (PCIN, 1953: 93).

En 1965, le sénateur Jacob Javits [un Juif] (Congressional Record 111, 1965: 24469) pouvait annoncer en toute sérénité au Sénat lors du débat sur le projet de loi sur l’immigration que «Tant les impératifs de notre conscience que les théories sociologiques nous disent que l’immigration, telle qu’elle est abordée dans le système des quotas par origine nationale, est fautive et qu’elle ne repose sur aucun fondement rationnel ou factuel, nous savons bien qu’il est absurde de prétendre qu’un homme vaut mieux qu’un autre à cause de la couleur de sa peau». La révolution intellectuelle et sa traduction dans les politiques publiques étaient parvenues à leur terme (CofC: 253–254).

De plus, même la stratégie anti-restrictionniste d’Oscar Handlin, l’éminent historien de Harvard et intellectuel discuté plus en détail ci-dessous, intégrait à sa manière la révolution raciale en sciences sociales, il maintenait certes «qu’il était possible et nécessaire de faire la distinction entre les «races» d’immigrants qui réclamaient l’admission aux États-Unis » (Handlin, 1952: 4) – mais en encadrant de guillemets prophylactiques le mot «races», dans le droit fil des vues boasiennes, sapant par là toute base intellectuelle de l’ethnocentrisme blanc (Une priorité majeure de l’École de Francfort [CofC: Ch. 5]).

Écrivant dans Commentary (la revue de l’AJCommittee), Petersen (1955) citait un groupe de spécialistes des sciences sociales à prédominance juive dont les travaux, à commencer par le plaidoyer d’Horace Kallen (en 1915 et 1924) en faveur d’une société multiculturelle et pluraliste, «constituent un début de légitimation universitaire d’une politique d’immigration différente qui aura peut-être un jour force de loi»(86).

                              

Horace Kallen 1882 – 1974

Le cercle comprenait également l’historien de Harvard Richard Hofstadter qui a joué un rôle déterminant en donnant des populistes de l’Ouest et du Sud (dont le soutien était essentiel aux restrictionnistes en 1924 et 1952) l’image d’antisémites irrationnels; il  condamnait leur volonté de «maintenir une civilisation yankee homogène» (Hofstadter, 1955: 34) et il développa l’approche «consensuelle» de l’histoire, caractérisée par Nugent (1963: 22) comme «ayant dans leur collimateur tout mouvement populaire qui aurait la prétention de menacer la prééminence d’une intelligentsia ou d’une élite urbaine, souvent universitaire, et l’utilisation de concepts issus des sciences du comportement».

 Les intellectuels de New York étaient emblèmatiques de cette élite (CofC: Ch. 6). Par exemple, la très influente revue de gauche Partisan Review était la vitrine principale des «Intellectuels de New York, un groupe dominé par des rédacteurs et des contributeurs ayant une identité ethnique juive et une profonde aversion des institutions politiques et culturelles américaines» (Cooney, 1986 : 225f; Shapiro, 1989; Wisse, 1987) …

Ils se considéraient comme des réprouvés marginalisés – une version moderne de l’ostracisation des Juifs traditionnellement observée dans la culture des gentils. «Ils n’avaient pas le sentiment d’appartenir à l’Amérique ou que l’Amérique leur appartenait» (Podhoretz, 1967: 117; souligné dans l’original). C’était à tel point qu’un chroniqueur New-Yorkais a fini par demander (Podhoretz, 1967: 283) si le clavier de Partisan Review disposait d’une touche spéciale pour le terme «aliénation» (CofC: 216–217).


Enfin, Joyce en 2019, rapporte une campagne principalement à l’initiative de Samuel H. Flowerman, directeur de recherche de l’AJCommittee et affilié à l’Institut de recherche sociale de l’École de Francfort (voir CofC : Ch. 5), pour influencer l’opinion publique dans les médias américains après la Seconde Guerre mondiale. Flowerman a coédité avec Max Horkheimer (directeur de l’Institute for Social Research) la très influente série Studies in Prejudice [études sur les préjugés et les discriminations], publiée par l’AJCommittee. Il a en outre constitué tout un réseau d’intellectuels Juifs et de spécialistes des sciences sociales, dont beaucoup occupaient des postes importants dans les universités et les médias (à une époque où les studios d’Hollywood, toutes les chaînes de télévision américaines et les journaux influents [par exemple, le New York Times et le Washington Post] appartenaient à des Juifs).

Tous ses efforts visaient à dominer les communications de masse américaines afin de «chambouler les normes de l’endo-groupe blanc – de façon à ce que ce soit cet endo-groupe blanc lui-même qui commence à exercer une pression en son propre sein à l’encontre de l’ethnocentrisme de ses membres; c’était «une vaste entreprise collective juive qui avait pour unique objectif de faire sauter les verrous de l’opinion publique blanche américaine et de l’altérer du tout au tout» (Joyce, 2019:6, 11; voir, par exemple, Flowerman, 1947).

Organiser l’Antirestriction

Les associations juives ont organisé, dirigé, financé et réalisé la plupart des actions des grandes organisations antirestrictionnistes de 1945 à 1965, notamment la Ligue nationale libérale pour l’immigration, le Comité des citoyens pour les personnes déplacées, la Commission nationale sur l’immigration et la Citoyenneté, la Conférence conjointe sur la législation étrangère, la Conférence américaine sur l’immigration et le PCIN. «Toutes ces associations ont planché sur les lois sur l’immigration, diffusé des informations au public, présenté des témoignages au Congrès et planifié toutes sortes d’activités propices … Il n’y a eu aucun résultat immédiat ou spectaculaire, mais la campagne assidue [de l’AJCommittee] en collaboration avec des organisations partageant les mêmes idées a finalement poussé les administrations Kennedy et Johnson à agir (Cohen, 1972: 373).

Concernant le PCIN [President’s Commission on Immigration and Naturalization instaurée par Harry Truman le 4 septembre 1952, executive order 10392]:

L’AJCommittee s’est également fortement impliquée dans les délibérations du PCIN (instaurée par le président Truman), notamment en produisant des témoignages et en fournissant des documents aux personnes et organisations témoignant devant le PCIN (Cohen, 1972: 371).

Toutes ses recommandations ont été incluses dans le rapport final (Cohen, 1972: 371), y compris celles concernant une moindre pondération des compétences économiques comme critères d’immigration, l’abandon pur et simple du système des quotas par nationalité, l’ouverture de l’immigration à tous les peuples du monde en suivant une simple logique de «premier arrivé, premier servi», la seule entorse du rapport de la PCIN étant qu’elle a opté pour un niveau d’immigration global moindre que ce qui était préconisé par l’AJCommittee (CofC: 281). 

Le président du PCIN en était Philip B. Perlman [un Juif], la commission comportait en outre une forte proportion de Juifs, elle était dirigée par Harry N. Rosenfeld (directeur exécutif) assisté d’Elliot Shirk.

Son rapport a été approuvé sans réserve par l’AJCongress (voir Congress Weekly 12 janvier 1952: 3). Les actes ont été imprimés sous la forme du rapport Whom We Shall Welcome (PCIN, 1953) avec la coopération du représentant Emanuel Celler [Juif] et avec un essai d’Oscar Handlin, l’activiste universitaire Juif (voir ci-dessous).

Oscar Handlin

Enrôler des non Juifs dans le projet

Un effort particulier était consenti par ces organisations au recrutement de non Juifs sympathisants et bien en vue. Du fait que les Juifs ne constituent qu’une faible minorité dans les sociétés occidentales, ils veillaient en permanence, depuis au moins le début du XXe siècle, à s’associer des non Juifs puissants et influents pour leurs entreprises (MacDonald, 1998b/2003 : Ch. 6). Par exemple, en 1955, l’AJCommittee a monté un groupe de citoyens influents sous le nom de Commission nationale sur l’immigration et la citoyenneté, la plupart des membres étant des non Juifs, «afin d’apporter un certain prestige à la campagne» (Cohen, 1972: 373). «Pour porter les changements politiques, les associations juives ont lancé une campagne ambitieuse de parution et de diffusion (de livres ou de brochures) et pour enrôler des politiciens de premier plan favorables à une immigration soutenue» (Tichenor, 2002: 205).

Une de leurs plus grandes réussites aura été de s’attacher les services du sénateur et futur président John F. Kennedy qui mettra en 1958 son nom en couverture du célèbre A Nation of Immigrants. Autre recrue de choix, le sénateur et futur vice-président et candidat démocrate à la présidentielle, Hubert Humphrey, avec son livre paru en 1954: Stranger at Our Gate (Tichenor, 2002: 205).

Kennedy a été recruté par l’ancien directeur national de l’ADL Ben Epstein (Greenblatt, 2018), le livre a été publié par l’ADL qui a également fourni pour le projet l’historien Arthur Mann (doctorant d’Oscar Handlin à Harvard [Ngai, 2013]) (Graham, 2004: 82), le livre lui-même n’a pas été écrit par Kennedy mais par Myer Feldman, par la suite une des éminences grises de l’administration Kennedy/Johnson (Tichenor, 2002: 205).

Néanmoins, malgré son importance évidente pour la communauté juive engagée, les parrains les plus en vue de la loi de 1965 «ont tout fait pour minimiser son importance dans le discours public. Les responsables politiques nationaux étaient bien conscients que le grand public était opposé à une augmentation du volume ou de la diversité de l’immigration aux États-Unis … [Cependant,] en réalité, ces soi-disant petits ajustements législatifs du milieu des années 1960 ont reconfiguré du tout au tout les schémas d’immigration, et, du même coup, la nation. Les années qui ont suivi l’adoption de la loi voyaient une forte augmentation des admissions» (Tichenor, 2002: 218). Tichenor note que les avalanches migratoires (voir ci-dessous) et la diversité ethnique des immigrés ont modifié à jamais les États-Unis.

Rejeter le statu quo ethnique mis en place par les lois sur l’immigration de 1924 et 1952

Même en remontant à la bataille sur la loi sur l’immigration de 1924, on voit que les militants Juifs se sont en fait toujours explicitement opposés à un statu quo ethnique lors des audiences du Congrès. «À une époque où la population des États-Unis dépassait à peine les 100 millions d’habitants, [Louis Marshall, avocat influent associé à l’AJCommittee et chef des forces de lobbying anti-restrictionnistes] déclarait: «Il y a de la place dans ce pays pour dix fois sa population actuelle»; il préconisait l’accueil de tous les peuples du monde sans limite de quota, à la seule exclusion des individus qui «étaient mentalement, moralement et physiquement inaptes, hostiles au gouvernement organisé, ou encore, susceptibles de devenir des charges publiques» (CofC: 263).

       

Louis Marshall

De même, le rabbin Stephen S. Wise, représentant l’AJCongress et diverses autres organisations juives lors des audiences de la Chambre sur la loi de 1924, revendiquait «le droit de tout homme en dehors de l’Amérique d’être considéré de manière juste et équitable et sans discrimination» (Ibid. ).

Le rabbin  Stephen S. Wise

Graham (2004: 80) note que le lobby juif de l’immigration «ne visait pas seulement à ouvrir les portes aux Juifs, mais visait aussi à une diversification suffisante des flux pour en finir avec le statut majoritaire des Européens de l’Ouest et diminuer ainsi le risque d’un régime fasciste». Le rôle moteur de la peur et de l’insécurité était spécifique à la communauté juive, on ne le retrouvait pas dans d’autres milieux prônant la fin des dispositions sur les origines nationales des lois de 1924 et 1952; une telle vision impliquait de changer l’équilibre ethnique des États-Unis. On retrouve bien cette appréhension de la communauté juive dans ce qui suit:

Svonkin (1997:8f) montre qu’un sentiment de méfiance et d’insécurité continuait d’imprégner la communauté juive américaine au lendemain de la Seconde Guerre mondiale – même devant l’évidence que l’antisémitisme avait décliné au point de n’être plus qu’un phénomène marginal. La conséquence immédiate en était que «l’objectif principal des officines intracommunautaires [à savoir l’AJCommittee, l’AJCongress et l’ADL] après 1945 était … d’empêcher l’émergence d’un mouvement de masse réactionnaire antisémite aux États-Unis». (Svonkin, 1997: 8).

Écrivant dans les années 1970, Isaacs (1974: 14f) évoque une appréhension diffuse et une hypersensibilité chez les Juifs à propos de tout ce qui pourrait être considéré comme antisémite. Interviewant des «personnalités publiques» au sujet de l’antisémitisme au début des années 1970, Isaacs demandait: «Pensez-vous que cela pourrait arriver ici?» «Il n’a jamais été nécessaire de définir le «cela» en question». Presque toujours, la réponse était à peu près la même: «Si on connaît tant soit peu l’histoire, on ne peut que s’y attendre», ou «Ce n’est pas une question de si; c’est une question de quand» (Isaacs, 1974: 15).

Bien après l’adoption de la loi de 1965, l’éminent sociologue et militant Juif Earl Raab se montrait très satisfait du succès rencontré par la politique d’immigration américaine dans la modification du paysage ethnique des États-Unis. Il notait pour une revue communautaire que les Juifs y avaient joué un rôle de premier plan (Raab, 1993: 17). Enfonçant le clou, il faisait remarquer que «cette hétérogénéité ethnique toujours plus grande était un gage contre l’émergence d’un parti populiste extrémiste» (Raab, 1995: 91).

Cette crainte que les blancs puissent un jour se retourner contre les Juifs a donc persisté longtemps après l’adoption de la loi de 1965. Elliott Abrams (1999: 190) notait que «la communauté juive américaine ne démord pas de ce qui n’est au fond qu’une vision noire de l’Amérique: un terreau fertile sur lequel l’antisémitisme peut ressurgir à tout moment».

Earl Raab

En 1952, la PCIN faisait observer que si la législation de 1924 avait réussi à maintenir le statu quo racial, ce n’était pas tant en vertu du système des origines nationales, car il y avait déjà des niveaux élevés d’immigrants hors quota (principalement des réfugiés européens du communisme), tandis que dans le même temps, les pays d’Europe du Nord et de l’Ouest, eux, ne remplissaient pas les leurs. Le rapport estimait que le principal obstacle à la modification du statu quo racial était en réalité la limitation du niveau global de l’immigration.

Le [PCIN] considérait donc la modification du statu quo racial aux États-Unis comme un objectif souhaitable et, à cette fin, insistait sur l’urgence qu’il y avait à donner la priorité à  l’augmentation du volume d’ensemble de l’immigration. (PCIN, 1953: 42). Comme Bennett le note (1963:164), aux yeux de la PCIN [dont on a vu plus haut la composition], les restrictions de la législation de 1924 portant sur le nombre d’immigrants «étaient indéfendables étant donné qu’il était scientifiquement prouvé qu’une race n’était pas meilleure qu’une autre – que ce soit dans l’optique de l’obtention la citoyenneté américaine ou pour tout autre visée». En conséquence, les défenseurs de la législation de 1952 [restrictionnistes] ont détourné la question raciale en l’amenant sur le terrain des  antagonismes ethniques qu’il s’agissait d’éviter.

Le sénateur Pat McCarran déclarait que renverser le système des origines nationales «reviendrait à changer en une génération la composition ethnique et culturelle de cette nation» (dans Bennett, 1963: 185) – ce qui en effet n’a pas manqué d’arriver. (CC : 281)

[Voici une citation édifiante de Pat McCarran qu’on trouve sur Wiki:

«Je pense que cette nation est le dernier espoir de la civilisation occidentale, et si cette seule oasis qui reste au monde venait à être envahie, pervertie, contaminée ou détruite, alors c’est la flamme vacillante de la dernière chandelle de l’humanité qui s’éteindra. Je ne conteste pas ceux qui louent les contributions apportées à notre société par des personnes de différentes races, de croyances et de couleurs diverses. L’Amérique est en effet à la confluence de nombreux ruisseaux qui forment un fleuve puissant que nous appelons la voie américaine. Mais nous avons aujourd’hui aux États-Unis des blocs non assimilés, des noyaux durs qui ne se sont pas intégrés au mode de vie américain, qui, au contraire, en sont les ennemis mortels. Aujourd’hui, comme jamais auparavant, des millions de personnes prennent d’assaut nos portes pour être admises et ces portes menacent de céder sous la pression. La solution des problèmes de l’Europe et de l’Asie ne passera pas par une transplantation massive de ces problèmes aux États-Unis… Je ne veux pas jouer les prophètes, mais si les adversaires de ce projet de loi réussissaient à le tailler en pièces, ou à la dénaturer jusqu’à la rendre méconnaissable, ils auront alors contribué à précipiter la chute de cette nation plus que toute autre faction depuis que nous avons obtenu notre indépendance».]

Comme indiqué ci-dessus, Cong. Emanuel Celler [Juif] a participé à la publication du rapport Whom We Shall Welcome (PCIN, 1953) qui considérait le changement de l’équilibre ethnique des États-Unis comme un objectif souhaitable. Cofnas (2021) conteste cependant l’univocité sans nuances des intentions de la PCIN en relevant que «Même les rapporteurs de la loi ont été pris au dépourvu par certaines de ses conséquences immédiates. Selon Graham (2003: 94-95): «Emanuel Celler, lui-même, troublé par la forte baisse de l’immigration européenne, a présenté un projet de loi pour permettre une plus grande immigration en provenance d’Irlande, de Grande-Bretagne et des pays scandinaves, qui, selon lui, avaient été désavantagé» par son propre texte».

Cependant, étant donné la substance du rapport de la PCIN et l’implication de Celler dans sa publication, il est difficile de croire que Celler n’a pas lui aussi préconisé de modifier l’équilibre ethnique des États-Unis. Le fait que Celler ait voulu augmenter l’immigration en provenance de certaines parties de l’Europe n’est en rien incompatible avec cela.
On serait beaucoup plus convaincu si Celler avait préconisé une loi réaffirmant explicitement le statu quo ethnique – c’est ni plus ni moins ce que faisaient dans leur préambule les lois de 1924 et 1952, des lois auxquelles il s’est farouchement opposé pendant plus de quarante ans. Se débarrasser du système des quotas par origine nationale n’était qu’un préalable au changement du statu quo ethnique, Celler en était bien conscient. Il ne resterait plus aux successeurs qu’à relever le nombre absolu d’immigrants, tout comme le préconisait la PCIN, et c’est bien ce qui a fini par se produire.

Autre élément trahissant un consensus juif sur cette question, l’AJCongress, la plus grande organisation juive américaine à l’époque, témoignait lors des audiences du Sénat sur la loi de 1952 en affirmant que si la législation de 1924 avait réussi à préserver l’équilibre ethnique des États-Unis, «Cela ne lui donnait pas pour autant une quelconque valeur. Il n’y avait rien de sacro-saint dans la composition de la population en 1920. Il serait absurde de croire que nous avions atteint le sommet de la perfection ethnique cette année-là» (Joint Hearings Before the Subcommittees of the Committees on the Judiciary, 82nd Cong., 1st Sess., on S. 716, H.R. 2379, and H.R. 2816, 6 mars – 9 avril 1951, 410).

Dans le même temps le Congress Weekly, le bulletin de l’AJCongress, dénonçait régulièrement les dispositions relatives aux origines nationales comme fondées sur le «mythe de l’existence de souches raciales supérieures et inférieures» (17 oct 1955: 3) et prônait l’immigration «en fonction des besoins et sur des critères sans rapport avec la race ou l’origine nationale» (4 mai 1953: 3).

Le Dr Israel Goldstein (1952a: 6), président de l’AJCongress, écrivait que «le système des quotas nationaux était devenu scandaleux … alors que toute notre expérience nationale avait confirmé sans aucun doute possible que notre force réside dans la diversité de nos peuples» (Goldstein, 1952b: 5), une déclaration qui anticipait l’actuel mantra récité

par l’establishment tant universitaire que médiatique et politique américain: «La diversité est notre plus grande force».

De grandes figures juives connues du public, tels que Oscar Handlin, historien à Harvard, publiaient des livres et des articles proimmigration (par exemple, The Uprooted [1951/1973]). L’article de Handlin (1952), La lutte pour l’immigration ne fait que commencer, est paru dans Commentary (publié par l’AJCommittee) peu de temps après que le Congrès contrôlé par les démocrates ait annulé le veto du président Truman à la loi restrictive de 1952 [FG: situation complexe, Truman était Democrat, mais les Democrats étaient divisés en deux camps, celui emmené par le rapporteur de la loi Pat McCarran, très restrictionniste, et celui emmené par Emanuel Celler, le Juif auteur du rapport antirestrictionniste de la PCIN, la commission présidentielle mise en place par Truman sur l’immigration, Truman, évidemment, était du côté de la commission qu’il avait mise en place, d’où son veto à la loi restrictionniste de 1952]

Dans un commentaire bien révélateur du leadership juif des forces pro immigration et du relatif désintérêt des autres minorités arrivées au début du siècle (voir ci-dessus Neuringer, 1971: 83) Handlin se plaignait de l’apathie des autres «Américains à trait d’union», peu enclin à se joindre à la bataille de l’immigration [FG: «Américains à trait-d’union», par exemple,  Afro-Américain, Italo-Américain etc. mais justement, comme d’habitude, les Juifs ont exigé un traitement à part en refusant que soit placé un trait d’union entre Juif et Américain le commentaire de Handlin n’est donc pas tout à fait logique sur ce point!].

Handlin utilisait sans cesse un «nous» comme par exemple dans: «Si nous ne pouvons pas battre [Sen. Pat] McCarran et ses acolytes avec leurs propres armes, nous pouvons du moins nous arranger pour réduire à néant l’efficacité de ces armes» (4). Ce «nous» trahissait sa conviction que toute la communauté juive partageait un fort intérêt pour une libéralisation de la politique d’immigration et qu’elle devait rester optimiste et combative pour faire en sorte que la loi de 1952 s’émousse progressivement dans son application jusqu’à finalement être remplacée par une nouvelle. C’est cette érosion de la loi de 1952 qui est évoquée par Graham (2003) et utilisée par Cofnas comme cadre général de la loi de 1965. [FG: mais on le voit, ce «cadre général», se restreint en fait aux Juifs]

Handlin rejetait sans équivoque l’idée d’un statu quo ethnique, estimant qu’il était «illusoire [de s’attendre à] ce que la composition de la population américaine reste telle qu’elle est» (Handlin, 1947: 6). Jamais il ne s’est donné la peine de répondre aux justifications avancées par les restrictionnistes en 1924, voici comment il résumait leur position: «Les hordes de races inférieures, qui affluaient alors librement dans le pays au mépris total des dernières prescriptions de l’hygiène raciale [une référence aux théories de la différence raciale courantes parmi les élites et largement propagées par les médias populaires dans les années 1920], se mêlaient à tout va avec les Anglo-saxons, produisant inévitablement une détérioration de l’espèce» (1951/1973: 257).

Handlin laissait donc délibérément de côté le véritable argument utilisé par les restrictionnistes lors des débats du Congrès de 1924 – et selon lequel le système des quotas par origine nationale était équitable pour toutes les minorités du pays puisqu’il maintenait le statu quo ethnique (CofC: 263), avec l’idée sous-jacente, parfaitement défendable dans une perspective évolutive, que chaque minorité cherchera toujours à défendre ses propres intérêts en matière d’immigration: c’est ce qu’on observe dans les tiraillements entre Palestiniens et Juifs en Israël sur un droit de retour des Palestiniens).

Handlin était une figure clé des années qui ont précédé l’adoption de la loi de 1965. Ngai (2013) a souligné son importance en ces termes:

La pensée de Handlin aura été à la fois un reflet et un aiguillon de l’évolution de la politique d’immigration dans la période d’après-guerre. On peut lui attribuer le mérite d’avoir popularisé une nouvelle interprétation de l’histoire américaine, celle qui  faisait de l’immigration le cœur du développement économique et démocratique américain. En créant sa théorie normative de l’histoire, il fondait le cadre pour une réforme politique immédiate. Cette théorie n’est autre que celle que nous appelons communément «une nation d’immigrants» – elle a perduré pendant plusieurs générations dans le discours savant et populaire, et perdure sans doute encore aujourd’hui. (Ngaï, 2013, 62)

Ses contributions et ses efforts de longue haleine visant à abroger le système des quotas migratoires par origine ne doivent pas être sous-estimés. Ses écrits – universitaires ou journalistiques –  ont fourni une épistémè de la réforme, un cadre et une logique pour critiquer l’ancienne politique et définir les contours de la nouvelle.

Handlin n’a pas seulement donné voix et légitimité aux minorités ethniques euro-américaines en tant que telles, il leur a également donné une place centrale dans l’histoire américaine en soutenant que le pluralisme et ce qu’on appelle aujourd’hui «le vivre ensemble» étaient les piliers de la démocratie américaine. Le programme de réforme n’était donc pas seulement une question d’intérêt politique immédiat, c’était aussi une mission historique perçue comme le telos de la démocratie américaine et de l’américanisme après la Seconde Guerre mondiale. (Ngai, 2013, 65)

Grignoter le Statu Quo ethnique au cœur des lois migratoires de 1924 et 1952

Jusqu’à la loi de 1965, la plupart des migrants hors quota étaient des réfugiés du communisme. Ces migrants étaient majoritairement des non Juifs de Russie, de Pologne et de Tchécoslovaquie (Graham, 2003: 54), ils avaient profité de la soupape de sécurité que leur offrait «la loi des années 1920» – en cas de tension politique ou ethnique dans le pays d’origine, pour s’assimiler à la culture américaine. (Graham, 2003: 48).

Dans les années 1950, ces flux européens qui s’assimilaient au fur et à mesure n’étaient pas considérés comme modifiant l’équilibre démographique du pays – même s’il s’agissait  de réfugiés d’extrême gauche (également persécutés pa les communistes): dans les années vingt, l’Amérique se défiait de ces derniers comme de la peste (en particulier en ce qui concerne les immigrants Juifs [CofC: Chs. 3 & 7]).

Les Américains étaient heureux de les accueillir parce qu’ils étaient considérés comme affirmant la supériorité de la culture américaine sur le communisme pendant la guerre froide; par exemple, la persécution du cardinal hongrois József Mindszenty (qui a vécu à l’ambassade américaine à Budapest pendant 15 ans avant d’être exilé) a énormément touché les Américains, en particulier les catholiques.

Ainsi, en pratique, les flux migratoires des années cinquante auront été très éloignés du profil de l’immigration après 1965. Bien que l’immigration des années 50 reflétait une nette évolution des attitudes qui prévalaient dans les années 1920, la logique était loin de celle de l’immigration post-1965 dont la règle principale était qu’aucune justification n’était nécessaire – même les compétences nécessaires au pays n’avaient qu’une faible priorité.

Mais déjà en 1961, il y avait eu une loi qui était une sérieuse entorse au principe des quotas: la loi sur le regroupement familial [Family unifcation en américain]. Le concept n’était pas nouveau, le regroupement familial était au cœur des préoccupations juives sur l’immigration dès 1924 (Neuringer, 1971: 191)  —  un point bien souligné par le  Rep. Francis Walter, le chef des restrictionnistes à la Chambre lors des débats de 1952, en parlant du rôle particulier que les organisations juives avaient joué en tentant de favoriser le regroupement familial plutôt que les compétences spéciales comme base de la politique d’immigration américaine (Congressional Record 13 mars 1952 : 2284).

Au sujet du regroupement familial instauré par la législation sur l’immigration de 1961, Bennett (1963: 244) disait que «le principe du regroupement familial est devenu le «sésame ouvres-toi» de l’immigration».

Bennett (1963: 256) notait également que «l’extension indéfinie du statut hors quotas pour les immigrants des pays où ils étaient largement dépassés parce que fortement discriminés et pénalisés [par la loi McCarran-Walter de 1952], ajoutée aux dispenses administratives, à l’interprétation toujours plus large des statuts et aux projets de loi en cours d’élaboration suffisaient à accélérer et à rendre manifestement ineluctable un bouleversement du paysage ethnique de la nation (257).

La loi de 1961 était taillée sur mesure pour augmenter le nombre d’immigrants car elle autorisait la «migration en cascade» des membres de la famille en autorisant le regroupement familial sans limite de quotas [«en cascade»: on fait venir son épouse, l’épouse fait venir son frère etc.]. «La préférence familiale aura été un puissant levier pour les nouveaux arrivants qui laissait les Américains «de souche» désarmés et sans prise sur  l’avenir du pays – désormais passé aux mains des migrants. (Graham, 2004: 91) (Tout simplement parce que les citoyens dont la famille remontait à plus d’une génération ou deux – et a fortiori  les Américains de souche fondatrice – n’avaient  plus que peu ou pas de parents proches vivant à l’étranger).

Emprise sur le Congrès et l’Exécutif

Les Juifs étaient à la pointe du combat antirestrictionnistes au Congrès et ont joué un rôle important de par leur place dans l’exécutive. Au Congrès, parmi les personnalités les plus notables, on trouvait le Rep. Celler (également chef de file des forces antirestrictionnistes lors des débats du Congrès de 1924) et les Sen. Jacob Javits et Herbert Lehman, tous des membres éminents de l’ADL. Après avoir noté le leadership des Juifs au Congrès, Graham (2003: 57) note que «moins visibles, mais tout aussi importants, il y avait tout le travail des conseillers clés du personnel présidentiel et des agences. Ceux-ci comprenaient des conseillers politiques d’envergure tels que Julius Edelson et Harry Rosenfeld dans l’administration Truman, Maxwell Rabb à la Maison-Blanche du temps d’Eisenhower et l’assistant présidentiel Myer Feldman [qui, comme indiqué, était le nègre de Kennedy pour la rédaction du  A Nation of Immigrants], secrétaire d’État adjoint d’Abba Schwartz et procureur général adjoint de Norbert Schlei dans l’administration Kennedy-Johnson». Schlei était en outre le chef du bureau de l’avocat général du ministère de la Justice de 1962 à 1966 et le personnage le plus important dans la rédaction du projet de loi sur l’immigration de 1965 (New York Times, 2003). Graham (2004: 88) mentionne également Feldman, Schlei et Schwarz, comme des personnalités importantes dans les questions liées à l’immigration sous l’administration Kennedy-Johnson.

Consensus juif sur la politique d’immigration

Tout au long de cette période, les attitudes antirestrictionnistes étaient partagées par la grande majorité de la communauté organisée – «des croyants aux athées, de l’extrême droite à l’extrême gauche» pour reprendre les paroles du juge Simon Rifkind lors de son audition au Congrès en 1948 en tant que représentant d’une longue liste de groupes juifs nationaux et locaux

Cofnas (2018, 2021) soutient qu’en raison de leurs capacités intellectuelles, les Juifs ont toujours été fortement surreprésentés des deux côtés de diverses questions.

Ce n’était absolument pas le cas de l’immigration tout au long de la période critique qui s’est achevée en 1965 par l’abrogation des dispositions sur les origines nationales des lois de 1924 et 1952 – et même encore longtemps après. Jamais je n’ai trouvé d’organisation ou de personnalités juive à la tête des forces favorables aux lois de 1924 et de 1952 – ou opposées à la loi de 1965 au moment où elle a été promulguée.

Joyce (2021) montre le rôle puissant et continu des Juifs dans le combat pro immigration aux États-Unis dans la période contemporaine,  et, comme indiqué ci-dessus, qu’il existe encore à présent un substantiel consensus juif sur l’immigration.

 

Conclusion

J’en conclus que les Juifs à la tête de leurs organisations étaient une condition nécessaire pour faire passer la loi sur l’immigration de 1965. Comme toujours, l’activisme juif visait les institutions d’élite et les personnalités politiques, le changement se produisant finalement d’une manière descendante qui ne reflétait pas les attitudes de la plupart des Américains.

Comme le note Graham (2004: 88), «La question de l’immigration, a vu émerger un scénario désormais classique dans le débat public: des faiseurs d’opinion de l’élite choisissant un problème et une solution politique libérale, tandis que l’opinion populaire vent debout contre, mais informe et marginalisée, était vouée à la défaite.

6 – Questions annexes

Pourquoi les Juifs sont gauchistes?

[FG: passage sauté, il s’agit surtout pour Kevin MacDonald de contrer l’explication donnée de ce fait pour Cofnas:

Pour Cofnas, qui est Juif, les Juifs sont de gauche – malgré leur argent –  en tant qu’éternels opprimés, persécutés, rejetés etc.

Pour Kevin MacDonald, c’est quasiment tout le contraire, les Juifs sont gauchistes au sens révolutionnaire du terme parce qu’ils doivent forcément reformater les sociétés hôtes et en particulier casser les nationalismes et les peuples: voir tout ce qui précède dans l’article]

Le pourcentage de Juifs dans une société est-il essentiel au succès de leur activisme?

Cofnas (2021) note que les sociétés occidentales comme la Suède avec un très faible pourcentage de Juifs ont également ouvert leurs portes à l’immigration et adopté le multiculturalisme. Outre les militants qu’il cite (David Schwarz était particulièrement important), il faut également mentionner le rôle de la famille Bonnier, qui a longtemps eu une présence prépondérante dans les médias suédois (livres, magazines, journaux, télévision et film), (Groupe Bonnier , 2021).

Mais si on y regarde de plus près, l’image change du tout au tout.

Eckehart (2017) a dressé une liste de 17 débats sur l’immigration et la politique des minorités dans d’éminents journaux et magazines suédois entre 1964 et 1968, comprenant au total 118 articles. Schwarz en a personnellement écrit ou coécrit 37, soit 31% du total. C’est également lui qui est à l’origine de 12 des 17 débats.

Si on y ajoute les autres contributions juives, nous constatons que ce qui n’est qu’une minuscule minorité en Suède, moins de 1% de la population, était responsable de 46 articles, soit 39% du total. Tous les contributeurs Juifs étaient en faveur du multiculturalisme. De toute évidence, ils n’étaient pas présents des deux côtés de la barrière.

De plus, les minorités ont un avantage dans la compétition ethnique en étant plus capables de se mobiliser que les majorités, c’est-à-dire capables de faire des sacrifices pour une cause, par exemple en donnant de l’argent, du temps et du travail (Salter, 2006).

Même un petit groupe aux ressources limitées peut exercer une influence disproportionnée lorsque ses membres sont fortement mobilisés et que ses opposants, bien que supérieurs en nombre, sont indifférents.

C’est d’ailleurs bien la leçon générale qui ressort de tout ce que nous avons présenté plus haut sur la loi de 1965 sur l’immigration aux États-Unis. Dans le cas de l’Australie au cours des dernières décennies, Isi et Mark Leibler, dont les efforts ont été soutenus par de riches Juifs australiens, ont eu une très grande influence sur le gouvernement sur tout un éventail de questions, allant de la politique envers Israël à l’immigration, aux restrictions de la liberté d’expression (Cashman, 2020; Gawenda, 2020; Sanderson, 2021). Sanderson (2013) décrit également l’activisme efficace de Walter Lippmann dans la promotion d’une politique officielle de multiculturalisme en Australie dans les années 1970, motivée, au moins en partie, par la crainte que l’assimilation ne décime la communauté Juive.

De plus, l’influence des minorités est d’autant plus efficace qu’elle sévit dans les cultures individualistes, or, les sociétés scandinaves sont les cultures les plus individualistes qui soient au monde (Cf. les données sur la famille historique et la structure politique (MacDonald, 2018c, 2019). Les individualistes sont beaucoup plus susceptibles de voir les autres comme des individus plutôt que comme des membres de groupes concurrents, et ils sont relativement non ethnocentriques (Henrich, 2020 ; MacDonald, 2019, 2020, 2021).

En outre, la cohésion sociale de la culture individualiste est assurée par un «socle de valeurs morales» plutôt que par des identités fondées sur la parenté, la race ou l’ethnicité (MacDonald, 2019, 2021) – un socle en vertu duquel la dissidence, par exemple, de l’idéologie multiculturaliste dans l’Occident contemporain, conduit à la culpabilité et à d’éventuelles sanctions telles que l’ostracisme et la perte d’emploi.

Dans la culture occidentale contemporaine, ces communautés morales sont créées de manière descendante par une culture universitaire et médiatique d’élite dans laquelle les Juifs sont fortement surreprésentés (MacDonald, 2002b, 2019). Comme indiqué, un effort juif majeur après la Seconde Guerre mondiale aura été de créer une culture qui relègue l’ethnocentrisme blanc et la poursuite de ses intérêts aux marges politiques et sociales (voir aussi CofC: Ch.5).

En fin de compte, la Suède, en tant que société occidentale relativement petite et sans importance géopolitique, se trouve emportée par les tendances plus larges de l’Occident. Étant donné que les États-Unis sont le leader incontesté de l’Occident depuis la Seconde Guerre mondiale, il n’est pas du tout surprenant que les tendances qui ont commencé aux États-Unis soient vues sous un jour positif par les intellectuels et les politiciens suédois.

C’est encore plus vrai de la culture universitaire occidentale, qui est internationale et hiérarchique, de sorte que, par exemple, une fois que la révolution boasienne s’est produite dans les universités d’élite aux États-Unis et qu’elle y est devenue la sagesse incarnée, il était inévitable qu’elle se propage aux milieux universitaires dans tout l’Occident et avec des conséquences sur la politique d’immigration similaires.

Ainsi, Sanderson (2013:7) montre que les idées boasiennes sur la race étaient «une arme essentielle pour ouvrir l’immigration australienne aux minorités non blanches», et il discute du rôle crucial des universitaires Juifs et d’autres militants dans la promotion de l’opposition à la tradition blanche. politique australienne, il cite en exemple un article de Dan Goldberg (2008), le rédacteur national de l’Australian Jewish News, reconnaissant fièrement que «Les Juifs ont joué un rôle déterminant dans la conduite de la croisade contre la politique de l’Australie blanche».

Face à cela, contrastant singulièrement avec cet individualisme, Rubenstein (Rubinstein, 1995:7) note que «politiquement, la communauté juive est fortement unie autour d’un nombre limité d’objectifs sur lesquels il existe un consensus ou un quasi-consensus, notamment le soutien à Israël, la lutte contre l’antisémitisme, l’adhésion au multiculturalisme – laquelle va de pair avec l’endiguement de l’assimilation par l’enseignement dans les écoles juives».

MacDonald (CofC: 294) note que «le changement radical dans la politique d’immigration dans le monde occidental s’est produit à peu près au même moment (1962-1973), et dans tous les pays, les changements ont reflété les attitudes des élites plutôt que celles de la grande masse des citoyens. … Un thème récurrent a été que la politique d’immigration a été formulée par des élites qui contrôlent les médias et que des efforts ont été faits par les dirigeants politiques de tous les grands partis pour conjurer la peur de l’immigration».

Comme indiqué ci-dessus en citant Graham (2004: 88), l’influence descendante sur les politiques publiques était au cœur de l’activisme juif sur l’immigration dans les années 1960 et a largement fait tache d’huile sur d’autres questions de politique publique. L’anti-populisme et le contrôle par les élites défendus par les intellectuels Juifs au cours des décennies précédentes avaient fait école (CofC : Ch. 5) .

[…]

7 – En résumé

[…]

  • Il n’y avait pas de Juif ou d’organisation juive parmi les restrictionnistes ou dans les mouvements populistes pendant la période couverte par CofC – une période de grandes mutations pour l’Occident. Tout au long de cette période, les organisations et militants Juifs ont été uniformément pro immigration et les mouvements intellectuels juif éreintaient à tour de bras le populisme.
  • Comme indiqué ci-dessus, «dans l’Amérique d’avant les années 1960… il serait difficile, voire impossible, de trouver des intellectuels ou des militants Juifs importants qui ne se seraient pas situés sur la gauche du spectre politique», et je note que Cofnas ignore ce sur quoi s’est focalisé la puissance de la communauté Juive. Il ignore également le fait que les néoconservateurs Juifs, de loin le courant le plus important chez les conservateurs Juifs américains, ont été favorables à l’immigration et ont tout fait pour tirer le parti républicain vers la gauche sur les questions sociales, conformément aux vœux de fortes majorités de la population juive américaine.
  • Dans les débats sur l’immigration en Suède dans les années 1960, tous les contributeurs Juifs ont favorisé la position multiculturaliste. De même, en ce qui concerne l’Australie, il y a eu un consensus juif sur le multiculturalisme et d’autres questions, «en particulier le soutien à Israël, la lutte contre l’antisémitisem, l’adhésion au multiculturalisme – laquelle va de pair avec l’endiguement de l’assimilation par l’enseignement dans les écoles juives» (Rubenstein, 1995: 7).
  • Dans l’analyse du poids de l’influence juive, on ne peut pas se limiter à une une analyse purement statistique et éviter une description de la dynamique interne et des motivations des mouvements d’influences créés et dominés par eux. Au contraire, c’est comprendre les motivations et la dynamique interne de ces mouvements qui devrait avoir la priorité.

Sans quoi, on coure le risque, comme Cofnas, de passer à côté dans tous ces domaines et d’aboutir à une vision très déficiente de l’histoire et de l’activisme juif.

Traduction Francis Goumain

Source

The “Default Hypothesis” Fails to Explain Jewish Influence: the Rise of a Substantially Jewish Elite in the United States after World War II and its Influence on Immigration Policy (kevinmacdonald.net)

kevin.macdonald@csulb.edu

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Tomislav Sunic Interdit par Twitter

Tomislav Sunic, TOO, 25.4.2023

Hier, j’ai été banni de Twitter, en même temps que Kevin MacDonald et James Edwards. Je suppose qu’aux Etats-Unis bien d’autres « gêneurs » ont été également bannis ce jour-là. Absolument aucune explication n’a été fournie pour ce blocage. Je dois avouer que je n’ai jamais écrit de tweets élogieux sur la diversité multiraciale du monde antifa. Je n’ai jamais non plus montré mon admiration pour les homélies du pape François agenouillé aux pieds des migrants extra-européens. Pourtant, je n’ai jamais publié non plus de propos haineux envers des individus en particulier, ni envers des groupes ethniques extra-européens.Cette décision de Twitter ne me surprend pas du tout ; il y a 30 ans que j’écris, notamment dans The Occidental Observer, que la censure aux États-Unis a pris la succession de celle de l’Union soviétique. Je suis bien placé pour le savoir. Dans l’ancienne Yougoslavie communiste, ma famille et moi avons vécu une existence de proscrits durant des décennies. Mon père, qui avait été avocat, a même purgé une longue peine de prison pour « propagation de littérature anticommuniste ». Aujourd’hui, nous assistons à des purges intellectuelles du même type, même si elles sont enrobées d’un discours lénifiant, fait d’euphémismes fantaisistes et démonologiques, comme « lutte contre les discours de haine » et « formation à la sensibilité ethnique ». Et cela se déroule aux États-Unis comme dans l’Union européenne, où semble ressusciter ce qu’était le Commissariat du peuple aux affaires intérieures de l’Union soviétique, c’est-à-dire le NKVD.Historiquement, ce sont des processus qui se développent lorsqu’un système est voué à l’implosion. On peut se remémorer la guerre civile entre Marius et Sulla au premier siècle avant J.-C., ou, plus tard, la « damnatio memoriae » quand on s’efforçait d’effacer le souvenir de certains empereurs romains. C’étaient des empereurs dont le règne ne durait souvent que quelques mois. On sent le chaos à nos portes.                                        

Le Judéo-Bouddhisme: se libérer d’être blanc, s’éveiller du Christ (mais dans le vrai bouddhisme, aucune race ne souffre plus qu’une autre et il faut savoir oublier)

 Traduction Francis Goumain 

Source: Jewish Crypsis in American Buddhism – The Occidental Observer

De façon quasi prémonitoire, cet article d’Andrew Joyce examine l’orientation imprimée au Bouddhisme moderne par les Juifs en Occident et dans le monde, influence qui semble culminer dans l’actualité avec la photo scandaleuse du Dalaï Lama avec un jeune garçon.

 «S’il y a bien une chose qui ressort de toutes mes conversations avec les fondateurs des centres bouddhistes, c’est qu’ils ne font pas mystère de leur culture juive comme fondement de leurs aspirations à la justice sociale».  — Emily Sigalow, American JewBu: Jews, Buddhists, and Religious Change, 2019.

 «Pour l’homosexuel dégénéré Ginsberg, ses penchants l’ont tout naturellement conduit à suivre la voie de Chögyam Trungpa, un moine Tibétain alcoolique et débauché dont la doctrine de la «sagesse débridée» professait pour les conventions un dédain ostentatoire. C’est bien sûr ce genre de bouddhisme qui a eu les faveurs de la culture gaucho-LSD en Occident.»

 Le cryptojudaïsme dans l’Église n’a jamais vraiment cessé, qu’on pense à Vatican II ou même à l’Église Anglicane avec à ce Giles Fraser, un prélat infiltré qui n’a pas volé les âpres discussions dont il a été l’objet dans nos milieux. Pour autant, l’idée m’est venue à l’esprit que le multiculturalisme pouvait lui aussi offrir pléthore de masques sous lesquels poursuivre le travail de sape du christianisme. C’est en tombant par hasard sur une série de «séminaires sur la blancheur» proposés par des organisations bouddhistes américaines, et en particulier en m’intéressant de plus près à l’une d’entre-elles, la BRJ (Buddhists for Racial Justice), que j’ai découvert le pot aux roses que je soupçonnais: l’omniprésence juive au sein d’une religion – autre que le christianisme –  mais toujours dans le but de servir l’intérêt communautaire, et une fois de plus, de manière cryptée. La Providence a voulu que mon enquête coïncide avec la publication en novembre 2019, aux presses universitaires de Princeton, du livre d’Emily Sigalow: American JewBu: Jews, Buddhists, and Religious Change. Ce sont les étonnantes découvertes de Sigalow, accompagnées de mes propres observations, que je présente dans cet essai.

Les Juifs dans le Lotus 

Si je vous disais que je me suis intéressé à l’enseignement de Ram Dass, Puma Chodron, Krishna Das, Bhikkhu Bodhi, Surya Das, du Maître Zen Bon Seong, Thubten Chodron et du grand Maître Zen Wu Kwang, certainement qu’il vous viendrait à l’esprit une cohorte d’images  faites de Tibétains chauves, d’Hindous barbus et de Chinois au regard impénétrable. Votre imagination voguerait vers des destinations exotiques, dans la pénombre de temple à l’éclairage incertain, loin des néons et du tohu-bohu des villes américaines. C’est ça la magie des noms. Si maintenant je vous dis les vrais noms, vous allez vite redescendre sur Terre: Richard Alpert, Deirdre Blomfield-Brown, Jeffrey Kagel, Jeffrey Block, Jeffrey Miller, Jeff Kitzes, Cheryl Greene et Richard Shrobe — des bons vieux Juifs gauchistes urbains qui se sont réinventé en fondateurs et grands mages du Judéo-Bouddhisme, des Jusqu’au Bouddhisme en quelque sorte. Ces figures n’étant que les derniers avatars d’une histoire qui a commencé à Chicago, en 1893, avec Charles T. Strauss, modeste chapelier de son état, le premier non asiatique à se convertir au bouddhisme aux États-unis. Aujourd’hui, selon les estimations les plus conservatrices, 30% des bouddhistes non asiatiques sont ethniquement juifs, la plupart en position dominante sur le reste des 70%, principalement d’ascendance européenne. [1] 

Pour être honnête, même s’il y a eu quelques précurseurs comme Strauss, le mouvement judéo-bouddhiste n’a pris son essor que vers la fin des années 50, au moment où il a commencé à gagner en popularité au sein de la contre-culture gauchiste. On peut dire que la vogue est concomitante du mouvement Beat et de sa figure de proue, le poète Gary Snyder (qui n’est pas Juif). Snyder était un amoureux de la nature qui aimait vaquer à des emplois forestiers, il était passionné d’écologie et d’environnement, autant de facteurs qui l’ont amené à se rapprocher des attitudes traditionnelles est-asiatiques, en particulier du bouddhisme Zen; personnellement, je suis un grand admirateur de ses écrits. C’est lui qui fera connaître le bouddhisme Zen à Jack Kerouac (un Canadien d’ascendance bretonne d’expression française et anglaise qui immortalisera sa rencontre avec Snyder dans son roman de 1958, The Dharma Bums – Les Clochards célestes) et à Allen Ginsberg. Le bouddhisme de Snyder était austère, contemplatif et prescrivait un retour à la nature, toute chose que ni Kerouac ni Ginsberg encore moins, n’étaient prêts à accepter. Chacun de leur côté, Kerouac et Ginsberg ont trouvé la forme de bouddhisme qui leur convenait le mieux. Pour l’homosexuel dégénéré Ginsberg, ses penchants l’ont tout naturellement conduit à suivre la voie de Chögyam Trungpa, un moine Tibétain alcoolique et débauché dont la doctrine de la «sagesse débridée» professait pour les conventions un dédain ostentatoire. C’est bien sûr ce genre de bouddhisme qui a eu les faveurs de la culture gaucho-LSD en Occident. 

Dans les années 60, c’est cette variété de bouddhisme vu comme permissif, ou du moins dépourvu de jugement moral, qui a proliféré dans la contre-culture gauchiste – toujours insatiable dans sa quête de conventions sociales à renverser. Les Juifs étaient bien sûr particulièrement à l’  aise et surreprésentés dans ce genre de milieux et nombre d’entre eux ont glissé vers le bouddhisme. Les raisons de cette dérive ont longtemps fait l’objet de débats acharnés sur les campus et dans les médias(voir par exemple ici et ici). La raison qui ressort le plus souvent est une certaine lassitude envers le judaïsme, lassitude qui ne va pas toutefois pas jusqu’à remettre en cause une franche hostilité au christianisme vu comme le fons et origo de l’antisémitisme. Sigalow cite par exemple cette jeune «JewBu» qui dit franchement que «le christianisme me donne envie de vomir». [2] 

Une autre lui déclarait à la fin des années 60: « Ça m’est difficile de m’asseoir dans un groupe de méditation tel que l’Unitarian Universalist church. … Je suis d’accord que toutes les religions se rejoignent à un certain niveau, mais le mot «église» me reste en travers de la gorge [en raison de ma culture juive]. [3] 

Il y a un fond de vérité à tout ça. Comme je vais le montrer plus bas, pour nombre de ces Juifs, il s’agit bel et bien de combler certaines déficiences des formes religieuses du judaïsme – mais tout en continuant par ailleurs à valoriser au plus haut point la judaïcité. Il n’est pas non plus douteux que dans l’ensemble, ils entretiennent une profonde aversion pour le christianisme qu’ils jugent pathologiquement et négativement orienté à leur égard.  Est-il nécessaire de préciser que même si toutes les religions voient d’un mauvais œil les apostasies, une conversion du judaïsme vers le christianisme serait autrement plus ma vu dans l’entourage qu’une simple évolution vers l’athéisme. Mais ces considérations ne sont que propitiatoires et ne rendent pas réellement compte de l’attrait positif pour le bouddhisme en tant que tel. Je fais ici l’hypothèse que c’est la souplesse du bouddhisme, qui n’oblige à rien, ni dans les pratiques ni dans les professions de foi, au moins dans certaines variétés du bouddhisme, qui a permis aux Juifs d’adopter superficiellement une religion et une identité culturelle parfaitement étrangère sans compromettre les relations intracommunautaires ni même certains des principes fondamentaux du judaïsme. Allen Ginsberg, par exemple, n’était pas le dernier à se voir «à la fois en Juif et en bouddhiste». [4] 

Il faut bien comprendre que le bouddhisme des années 50 et 60 était une grande nouveauté en Amérique, il était donc encore très malléable, taillable et corvéable à merci – et les Juifs ne s’en sont pas privé. C’est d’ailleurs l’aspect le plus remarquable de l’ouvrage de  Sigalow qui montre à quel point ce ne sont pas tant les Juifs qui se sont adapté au bouddhisme que eux qui l’ont adapté à leur propre image et identité. 

Le Gauchisme des Bouddhistes Juifs

 Sigalow remarque que non seulement les Juifs se sont imposé en tant que fondateur et maître à méditer du bouddhisme tibétain ou Zen en Occident [5], mais qu’ils l’ont imprégné d’un «activisme éthique» qu’on ne lui avait jamais connu nulle part ailleurs auparavant. [6] 

Dans un article pour The Tablet, Michelle Goldberg reconnaît que «le bouddhisme américain est essentiellement une création juive qui ne ressemble à rien de ce qu’on lui connaissait traditionnellement». Il est intéressant de noter comme des bouddhistes occidentaux contemporains ont pu relever et dénoncer cette tendance à la «justice sociale» du bouddhisme américain. Brad Warner, qui a suivi l’enseignement d’un monastère Zen au Japon, souligne dans ses vidéos (voir ici, ici, ou ici) que pour le vrai bouddhisme il n’y a nulle hiérarchie dans la souffrance (toutes les races souffrent, tous les peuples, et personne plus que d’autres) – ce qui vient  heurter de plein fouet le bouddhisme américain, obnubilé qu’il est par un gauchisme égalitaire qui souhaite ouvertement voir baisser la démographie blanche. Warner poursuit implacablement en disant que le bouddhisme apprend à se concentrer sur le présent et à laisser s’évanouir le passé, là encore, à l’encontre du bouddhisme américain qui voudrait faire passer un voyage Auschwitz pour une retraite Zen destinée à montrer comme «nous devrions être ouverts à la diversité». Sans surprise, cela lui a valu une volée de bois vert, avec des noms d’oiseaux tels que «supporter de Trump» (ce qu’il n’est vraiment pas) et neonazi (ce qu’il est, si possible, moins encore). 

La différence entre le bouddhisme de Warner et celui qui a cours aux USA, c’est que Warner a suivi l’enseignement et l’ascèse d’un vrai centre au Japon, et non celui d’imposteurs Juifs, des gauchistes déguisés en maître Zen. Sigalow estime que nombre de «gourous» Juifs «ont des liens profonds au judaïsme» «et intègrent au bouddhisme nombre de ses principes et concepts [FG: dont Auschwitz]». [7] 

Il faut quand même reconnaître aux Juifs le mérite d’avoir été les premiers à s’engouffrer massivement dans le mouvement bouddhiste naissant à la fin des années 50 et au début des années 60, c’est ce qui a permis à toute leur clique d’être derrière la fondation de la plupart des structures qu’on connaît en Amérique. On trouve par exemple dès 1975, la Insight Meditation Society, censée s’ancrer dans la tradition du Théravada, c’est aujourd’hui l’un des plus grands foyers du bouddhisme américain. Les fondateurs en sont Jack Kornfield, Sharon Salzberg, et Joseph Goldstein. Shambhala Publications, la plus éminente maison d’édition du bouddhisme américain a été créée par Samuel Bercholz.

 Autre institution particulièrement en vue, la Zen Community of New York, désormais la Zen Peacemakers, a été fondée en 1980 par Bernard Glassman. C’est cette institution qui est la plus en pointe dans l’offre de visite à Auschwitz, son site à ce sujet vaut le détour:

 «De nouveau nous pourrons éprouver la sinistre présence des clôtures barbelées, nous retrouver dans ces baraquements où, il fut un temps, des humains étaient entassés pire que du bétail, nous pourrons prier du fond de ces quadrilatères, sur le sol sur lequel tant et tant sont tombés simplement du fait de leur différence de religion, de nationalité, d’ethnie ou de préférence sexuelle. Ou prier juste parce que. Parce que nous avons toujours des boucs émissaires, quelqu’un sur qui porter le blâme au lieu d’accepter la responsabilité complexe de vivre pleinement en être humain. … En Pologne, il est illégal de parler de la complicité polonaise dans le meurtre des Juifs polonais. Démocratie et diversité sont devenus des gros-mots. Les spectres hideux du sectarisme et du fanatisme ont ressurgi, alimentant la peur des immigrés, des réfugiés, des familles en détresse, des minorités ethniques et religieuses … Aujourd’hui nous assistons à l’intersectionnalité des discriminations  — des individus ou des groupes sont marginalisés en raison, et de leur couleur, et de leur orientation sexuelle, et de leur classe, et de leur religion, le tout inextricablement mêlé. … Que signifie la diversité pour nous? Est-ce que nous sommes tous ensemble, ou seulement certains privilégiés admis et les autres dehors?  Qui est inclus, qui est exclu? Aujourd’hui plus que jamais il est crucial de porter le témoignage de ce qui arrive quand on laisse faire la xénophobie et le fanatisme. La retraite à Auschwitz-Birkenau en 2020 ne témoignera pas seulement du massacre et de la torture des Juifs, des Gitans, des intellectuels et journalistes Polonais à une époque où une vie non aryenne était jugée sans valeur … Nous appelons et nous accueillons cette diversité aujourd’hui tout particulièrement.  … Comment construire des ponts plutôt que des murs?»

S’il vous saute aux yeux que ce descriptif est totalement dépourvu du moindre contenu un tant soit peu bouddhiste  — sans la plus petite trace de ce qui pourrait ressembler même de loin à une sereine méditation Zen, que par contre ça fait fichtrement penser à un billet d’un affidé de l’ADL [LiCRA], rassurez-vous, vous n’êtes pas tout seul dans votre cas, c’est  juste que vous venez de vous heurter tête la première sur le «bouddhisme américain» avec sa fragrance si particulière qui n’est pas sans évoquer les confins du Sinaï. Vous êtes excusé si vous ne saviez pas que le Spirit Rock Meditation Center de Californie a aussi été fondé par Jack Kornfield avec l’aide de sa compagne de route «bouddhiste» Sylvia Boorstein. Aujourd’hui son équipe d’enseignants s’articule autour de grands noms du bouddhisme américain comme Howard Cohn, Will Kabat-Zinn, Wes Nisker, et Donald Rothberg. La plupart des plus grands centres de méditation Zen, pour ne pas dire tous, sont dirigés par des Juifs: l’Empty Gate Zen Center (Jeff Kitzes), le Nashville Mindfulness Center (Skip Ewing), le Chogye International Zen Center (Richard Shrobe), et le San Francisco Zen Center (David Zimmerman). De plus, ce sont aussi eux qui ont la haute main sur toute la communication bouddhiste, notamment sur la scène littéraire. Tout ceci n’étant jamais que le prolongement de leur présence massive à la tête du mouvement à ses débuts – à tel point que le gourou de Ginsberg, Chogyam Trungpa, se serait exclamé à l’époque: «mais c’est l’oy vey school du bouddhisme!». 

Si on réfléchit au phénomène «JewBu» dans une perspective cryptique, on est frappé de voir comme on retrouve un haut degré de cohésion ethnique et de coopération entre ces nouveaux convertis. Dans la grande majorité des cas, ils œuvrent main dans la main à l’édification de l’infrastructure du bouddhisme américain et se marient entre eux. En général, ils continuent de s’afficher peu ou prou dans leur identité religieuse d’origine. 

Glassman, par exemple, entre deux «retraites bouddhiques» à Auschwitz, se sert volontiers de «contes rabbiniques pour enseigner le dharma à ses ouailles». [8] 

Gary Laderman, de son côté, explique que Sylvia Boorstein «se vit à la fois en juive fidèle et en bouddhiste pratiquante … Ses livrent visent à faire la synthèse entre bouddhisme, judaïsme et psychothérapie». [9] 

Sigalow remarque que Goldstein et Kornfield se montrent «des plus inventifs dans leur enseignement», [10] ce qui dit-elle plus loin doit être compris comme la capacité a «reconfigurer le bouddhisme» [11] pour qu’il aille avec leurs goûts culturels, religieux et politiques d’origine. On peut dire que les Juifs se sont lancés dans une véritable «réorganisation doctrinale» du bouddhisme (et non du judaïsme) [12] qui consiste à le débarrasser de tous les éléments exotiques qui le rattachent à une tradition, notamment ceux monarchiques ou patriarcaux et bien sûr, tout ce qui est gênant pour le judaïsme. Sigalow note ques éléments «dogmatiques, doctrinaux ou mythologiques» ont été réduit au silence et que les cycles de réincarnation «sont virtuellement absents de l’enseignement». Le bouddhisme tibétain se trouve ainsi amputé de pans entiers qui faisaient partie intégrante de sa doctrine. [13] 

Non seulement il y a eu des amputations, mais il y a eu des prothèses de rajoutées. Pour Sigalow, les Juifs ont imprégné le bouddhisme de «vertus psychologiques et psycho thérapeutiques» qu’on ne lui connaissait pas. Michelle Goldberg confirme en disant que ce  sont bien eux qui sont derrière «la psychologisation du bouddhisme», cela se manifeste particulièrement dans l’insistance sur la «tolérance» et la «bienveillance». [14] 

Sigalow ajoute que l’influence la plus profonde exercée par les Juifs au début des années 60 aura été de le lui faire endosser une responsabilité dans les luttes pour l’émancipation et l’égalité qui travaillaient la société à l’époque.  … «S’il y a bien une chose qui ressort de toutes mes conversations avec les fondateurs des centres bouddhistes, c’est qu’ils ne font pas mystère de leur culture juive comme fondement de leurs aspirations à la justice sociale». [15] 

Ces inflexions vers le psychologique et le sociétal sont capitales puisque c’est sur leur base que les gourous Juifs — qui d’après Sigalow n’ont jamais mis les pieds dans une communauté bouddhiste asiatique —  infligent un endoctrinement à leurs disciples blancs lors d’interminables séances d’auto-critique, de pseudo analyses de la Blancheur, de leçons de tolérance à haute dose, de pluralisme, et d’apprentissage de pseudo commandements religieux sur la «justice raciale». Comme les Juifs sont les pionniers de la psychanalyse et des Whiteness Studies, qu’ils restent les plus ardents partisans du pluralisme racial, il est difficile de ne pas croire que le bouddhisme reformaté par eux ne soit pas autre chose qu’un moyen supplémentaire au service de la poursuite de leurs buts, un moyen plus cryptique il est vrai. Buddhists for Racial Justice, par exemple, devenue la North American Buddhist Alliance, n’est que l’un des vecteurs de cet activisme aux États-Unis, l’une de ses figures clés étant Joshua Goldberg une chauve transsexuelle devenue un chauve transsexuel.

Cette promotion d’une forme psycho thérapeutique du néo bouddhisme auprès des blancs peut aussi être considéré comme un prolongement des efforts de l’école de Francfort pour traiter chez les Blancs des pathologies culturelles largement imaginaire telles que le refoulement et l’anxiété. Sans ambages, The Tablet reconnaît que ce sont les Juifs qui sont à l’origine de toute l’industrie de l’éveil en ayant débarrassé le bouddhisme de ses éléments mythologiques et en grossissant ses éléments appelant à cultiver le détachement des émotions. En fait le JewBu se distingue par son apologie de la tolérance, du pluralisme et du détachement de soi au point de négliger la défense de ses intérêts. Ceci va directement à l’encontre du bouddhisme historique qui a connu des formes guerrières et autoritaires, et directement à l’encontre d’exemples contemporains comme en Birmanie où on voit les moines rameuter les foules pour défendre le pays contre les musulmans et l’islam.

 À la merci des Gourous Juifs

 En tant que maître «Zen», les Juifs peuvent bien entendu obtenir un haut degré de soumission de la part de leurs adeptes blancs tout en masquant la nature précise de leurs activités. Les changements de nom si fréquents chez eux – bouddhisme ou pas – viennent encore opacifier la nature de la hiérarchie, rendant moins évident le népotisme et la prédominance juive en son sein. Par exemple, qu’un Wu Kwang fasse monter en grade un Surya Das fera moins sourciller qu’un Joseph Goldstein assurant la promotion d’un Joshua Goldberg. C’est ainsi que contrairement à ce qui s’est passé avec l’Église au moment de l’inquisition, les Juifs ont pu pulluler dans la hiérarchie bouddhiste au détriment des blancs, sans éveiller la méfiance, sans examen de théologie, et sans faire de déclaration abjurant leur judaïsme, bref, sans avoir à franchir aucun des obstacles gênant existant dans le christianisme. Du fait de la nature décentralisée du bouddhisme et de son système de transmission de l’autorité par filiation entre un maître et son disciple, tout ce qu’un Juif avait à faire, c’était de s’insérer dans le bon lignage (avec le bon maître) et au bon moment (la «oy vey school des années 50 et 60) et il pouvait prétendre à son tour à la direction du bouddhisme américain, consolider son infrastructure, sélectionner ses futurs gourous dans son ethnie d’origine (qui recevront de lui le Dharma) et en éliminer les dissidents rétifs au programme anti-blancs. C’est ainsi qu’on se retrouve avec des lignées bizarres dans le bouddhisme, avec un Zoketsu Norman Fischer, se déclarant maître Zen ayant hérité du Dharma de Sojun Mel Weitsman. 

Parfois, à l’occasion d’un scandale, le château de cartes s’écroule. Noah Levine est le fondateur du Against the Stream Meditation Center à Venice en Californie, il avait lui-même reçu le Dharma de Kornfield. Le centre se piquait «d’antisexisme et d’antiracisme» et s’est fait connaître en versant dans tout un folklore punk, il a joué un rôle important dans la promotion de la «woke» culture en donnant des cours «bouddhistes» sur le privilège blanc et le racisme.

Malheureusement pour Levine, en dépit de ses professions d’antisexisme, des accusations d’agression sexuelles sur les adeptes féminines du centre ont fait surface en 2019, forçant l’organisation à l’expulser. D’autres centres bouddhistes ont pris leurs distances avec lui et lui ont retiré ses certifications d’enseignement. Furieux, Levine a révélé le pot aux roses en disant que son père et ses collègues «Kornfield, Ram Dass, Joseph Goldstein, Sharon Salzberg» n’étaient que des imposteurs et que «ces types n’avaient aucune autorité pour enseigner, ils se la sont donnée à eux-mêmes». Ou pour le dire autrement, ils n’ont fait qu’inventer leur propre religion basée sur le détachement et la célébration de la diversité et ils l’ont appelé bouddhisme. 

Conclusion 

Profondément influencé par Arthur Schopenhauer, j’ai une sympathie naturelle pour les leçons du bouddhisme authentique sur la souffrance. On a aussi pu être frappé dans les milieux universitaires des parallèles entre le bouddhisme Zen et la philosophie de Nietzsche et de Heidegger, ce qui prouve qu’il n’est pas étranger aux oreilles des Occidentaux et qu’il peut toucher leur âme et leur esprit. Cela dit, la dérive de plus en plus marquée des Blancs vers le bouddhisme a de quoi inquiéter au vu de ce qui précède. Le bouddhisme américain s’avère n’être qu’un piège destiné à apprivoiser les Blancs et à promouvoir le multiculturalisme, autant d’objectifs contraires aux intérêts des Blancs  — ni plus ni moins les mêmes que ceux des activistes de la communauté juive en général.

 Notes 

[1] Sigalow,American JewBu: Jews, Buddhists, and Religious Change, 1.

[2] Ibid., 159.

[3] Ibid.

[4] Ibid., 59.

[5] Ibid., 57.

[6] Ibid., 58.

[7] Ibid.

[8] Ibid., 76.

[9] G. Laderman, Religion and American Cultures: Tradition, Diversity, and Popular Expression: 2nd Edition (Santa Barbara: ABC-CLIO), 57.

[10] Sigalow, 76.

[11] Ibid., 78.

[12] Ibid., 69.

[13] Ibid.

[14] Ibid., 70-71.

[15] Ibid., 73 & 76.

Quand Samuel Untermyer & Cie faisaient chanter Woodrow Wilson: Chantage, Loi Monétaire, Guerre Mondiale

23 janvier 2023 de Karl Haemers


Wilson et sa maîtresse, la sulfureuse Madame Peck

Woodrow Wilson (Président Américain de 1913–1921)

C’est bien simple, l’élection de Woodrow Wilson à la présidence des États-Unis est l’exact pendant en importance et en nature de la révolution bolchévik en 1917:  c’est la prise de pouvoir des Juifs à la tête des deux puissances émergentes amenées à dominer le monde jusqu’à nos jours.

Wilson a été choisi par eux pour s’opposer au Président Howard Taft qui refusait l’abrogation d’un traité commercial des USA avec la Russie Tsariste honnie, un traité qui, il est vrai, avait pris la précaution dans ses dispositions d’exclure de son champ d’application les hommes d’affaires Juifs d’origine russe récemment établis en Amérique, considérés, d’ailleurs à juste titre, comme une menace pour le pouvoir tsariste; la position de Taft était simple, il n’allait pas pénaliser 98% des Américains pour faire plaisir à 2% qui se sentaient lésés dans leurs droits: la minorité juive.

Erreur fatale de sa part, les «frères circoncis» comme il les appelait, constituaient une minorité, certes, mais seulement en nombre, pas financièrement, pas médiatiquement, pas politiquement. La victoire de Wilson aux élections signifiait non seulement un coup porté à la diplomatie et à la puissance du Tsar par la fameuse petite communauté – en effet internationale – mais aussi une victoire de cette communauté aux États-Unis même.

La victoire était aussitôt magistralement exploitée: le 23 décembre 1913, Wilson signait le décret de création de la Federal Reserve, le Federal Reserve and Internal Revenue Acts. Attention, le fait que les USA se dotent d’une grande institution monétaire centrale n’est pas en soi une mauvaise chose pour eux, bien au contraire, ce qui est contestable, c’est qu’elle soit créée en tant qu’institution privée sous contrôle du secteur bancaire privé largement aux mains de qui on sait, c’est un peu comme de privatiser la dissuasion nucléaire en la confiant à un cabinet de conseil.

Ce n’est pas tout, le début du deuxième mandat sera l’occasion d’engager tout autant, si ce n’est plus, tout l’avenir des États-Unis et du monde avec la décision d’entrer en guerre aux côtés de l’Entente, contre l’Allemagne, entrée en guerre obtenue en échange de la déclaration de Balfour sur la création d’un foyer national juif en Palestine.

La fin du mandat sera dans la même veine, c’est la signature du Traité de Versailles sur lequel il a énormément pesé avec son aréopage de conseillers Juifs et qui conduira presque mécaniquement à la Seconde Guerre mondiale et, en fin de compte, à la réalisation complète de la promesse de Balfour avec la création de l’État d’Israël.

Et à l’origine de tout ça, un bon petit chantage bien placé.

Samuel Untermyer fait chanter le Président

En 1910, Wilson vient de démissionner de son poste prestigieux de président de l’université Princeton pour se consacrer pleinement à sa campagne pour être élu gouverneur du New Jersey. Les Juifs fortunés ont pris fait et cause pour lui et le financent, ils l’accompagneront aussi dans sa course victorieuse à la présidence des États-Unis.

Sans doute savent-ils qu’un scandale menaçait d’éclater dans la presse: Wilson, derrière les murs couverts de lierre de l’université, avait eu une liaison avec la femme de son voisin de palier, le professeur Peck. Wilson, bien entendu, était marié de son côté. Or, le beau-fils de l’ex-madame Peck (entre-temps divorcée et remariée – mais pas avec Wilson!) avait imprudemment contracté une dette de 40 000 dollars qu’il était incapable d’honorer, l’ex- madame Peck non plus, mais elle avait quelque chose qui pouvait valoir 40 000 dollars: les lettres que lui avait adressées Wilson [tout au long de cette affaire, il ne faut jamais s’attendre à ce que la morale retrouve à un moment ses droits, bien au contraire, on s’en écarte à chaque étape de plus en plus …].

L’ex-madame Peck et ex maîtresse de Wilson, donc,  est allée voir Samuel Untermyer avec ces lettres et Samuel est allé voir Wilson, devenu président, pour lui proposer un marché tout simple: il effaçait la dette, mais en échange, Wilson devait nommer un Juif à la Cour suprême dès qu’un siège serait vacant.

Pour se faire une idée de la situation dans laquelle le pauvre Wilson se débattait, il faut bien comprendre qu’en un siècle, le dollar comme la morale publique se sont fortement dévalués: 40 000 dollars de l’époque représentent au bas mot 1,25 million maintenant, quant à une liaison extraconjugale, complètement démonétisée aujourd’hui, elle aurait suffi à ruiner sa carrière en un instant si jamais la presse s’en était emparée.

Comment est-ce que nous connaissons l’épisode? Par Benjamin Freedman, une sorte de Juif repentis. Freedman était jeune à l’époque, mais déjà, il avait la responsabilité de faire la liaison entre le Comité des Finances du Sénat dirigé par Henry Morgenthau Sr. [autrement dit, le père du sinistre Henry Morgenthau Jr., qui préconisera un plan d’extermination de l’Allemagne] et Rollo Wells, le Secrétaire au Trésor. En 1974, Freedman donne une conférence devant les cadets de la Marine dont voici le passage concernant Wilson:

Nous avions donc d’un côté ce président à Washington, Howard Taft, qu’il s’agissait de mettre par terre. De l’autre, Mr. Jacob Schiff, de la Kuhn, Loeb & Co., la branche new-yorkaise de l’internationale Rothschild à la tête de la ploutocratie mondiale. Mr. Schiff (qui en plus était à l’époque à la tête de l’American Jewish Committee), accompagné de deux jeunes loups, est parti voir Mr. Taft [pour le mettre en demeure d’abroger le traité commercial russo-américain]… En rentrant à New York, Schiff et sa camarilla se mettaient en ordre de bataille. J’étais à l’époque un protégé de Mr. Bernard Baruch… On plantait le décors pour faire perdre les Républicains et leur président, Taft, candidat à sa propre réélection. Mais ce n’était pas si facile … On avait placé Mr. Baruch à la manœuvre, c’était le plus habile! … On s’est mis en quête d’un candidat démocrate, ce fut Wilson. De son côté, Mr. Jacob Schiff apportait les fonds pour créer un parti bidon destiné à disperser le vote républicain … Il fallait quelqu’un à sa tête, on ressortait Théodore Roosevelt de la naphtaline (Il était devenu rédac-chef d’un petit magazine). On lui a dit «vous êtes l’homme de la situation, le seul capable de sauver les États-Unis» et ça a marché comme sur des roulettes. Le «Bull Moose Party» était mis sur pied avec le financement collecté par Mr. Jacob H. Schiff auprès de toute la diaspora, notamment de Londres. C’en était fait des Républicains, leur électorat se répartissait entre Roosevelt et Taft et Wilson raflait la mise sans même avoir la majorité. …

C’est une constante de la politique, chaque fois qu’un candidat est choisi pour être mis sur le devant de la scène, c’est parce qu’on dispose de munitions à son encontre. On savait que Wilson couchait avec sa voisine de palier à Princeton, que cette femme était l’épouse du professeur Peck et que pour tout Princeton, Wilson était l’âme damnée de Peck. Ayant obtenu le divorce [alors que c’est elle qui avait une liaison!] la vertueuse ex-madame Peck trouvait à se remarier à Washington, il faut croire qu’elle avait des arguments. Mais, justice divine ou loi de la nature, ce nouveau mari avait un fils encore plus vertueux que sa belle-mère: il avait emprunté 40 000 dollars à la banque sans leur en parler, il était incapable de rembourser la somme, et ça commençait à sentir sérieusement le roussi pour lui. Il en fallait plus que ça pour prendre au dépourvu notre aventurière à l’entregent décidément si conséquent. Elle avait entendu parler de Samuel Untermyer (du célèbre cabinet d’affaires, Googenheim, Untermeyer and Marshall), un gros contributeur du Parti démocrate (le parti de Wilson) et un de ses membres influents. Elle n’y est pas allé les mains vides, son charme n’aurait peut-être pas suffi, mais chargées d’un petit paquet de lettres … Ensemble, ils ont concocté un chantage en bonne et due forme sur Wilson. Elle a persuadé Samuel Untermyer d’aller le voir en sa qualité d’avocat. C’était facile, Untermyer avait déjà ses entrées auprès de Wilson et, pour la faire courte, Wilson n’avait pas l’argent, Untermeyer l’avait et le fils a pu rembourser sa dette. [passage de l’exposé difficile à saisir, autant on peut comprendre qu’un avocat serve d’intermédiaire dans une transaction «à l’amiable», autant on ne voit pas en quoi un avocat serait particulièrement bien placé pour mener une transaction illicite comme l’est un chantage, mais nous sommes sans doute trop naïfs]

Mais Mr. Untermeyer n’était pas qu’un simple intermédiaire et sa générosité avait ses limites, il faisait cette proposition qu’on ne peut pas refuser au Président Wilson: «Je vous avance l’argent si vous me faites une faveur. La prochaine fois qu’un siège se libère à la Cour suprême, c’est moi qui vous souffle le nom du successeur». Il précisait où il voulait en venir: «Il n’y a jamais eu de Juif à la Cour Suprême, et je pense qu’il serait temps qu’il y en est un». «Marché conclu» lui répondit Wilson et les $40,000 furent payés. Bientôt, en 1916, un siège se libérait et Mr. Untermeyer recommandait Mr. Brandeis. Mr. Brandeis était le sioniste numéro 1 aux États-Unis, leur chef de file, et il devenait un proche parmi les proches de Wilson.

Quelques précisions pour compléter et corroborer cette histoire: Wilson a entretenu huit années durant une correspondance intime avec Mary Hulbert Peck. Cette correspondance a débuté en 1907, alors qu’il était président de Princeton, s’est poursuivie durant son bref mandat de gouverneur du New Jersey, et s’est achevée en 1915 au milieu de son premier mandat présidentiel. On retrouve les lettres sur le site de l’American Heritage. Durant les sept premières années de cette période, Wilson est resté marié à Ellen Axton Wilson, laquelle est décédée en août 1914.

Louis Brandeis: une grande première à la Cour Suprême

Le 28 janvier 1916, Wilson nommait Louis Brandeis à la Cour Suprême. Mais ça n’a pas été facile. La nomination était si controversée que le processus de confirmation s’est étalé sur quatre mois – du jamais vu – et a été l’occasion de la toute première audition publique de la commission juridique de l’histoire du Sénat. Les plus farouches opposants à l’arrivée de Brandeis à la Cour se trouvaient parmi les conservateurs du Parti républicains et ils étaient bien entendu taxés d’antisémitisme. Bien des années plus tard, William Douglas, dans le New York Times , disait de Brandeis, qu’«il était dangereux parce qu’il était incorruptible et parce qu’il était un défenseur intraitable de la justice sociale».

Lorsque la commission sénatoriale demandait au procureur général, Thomas Watt Gregory, les lettres de parrainage de Brandeis, ce dernier annonçait qu’il n’y en avait pas. C’est Wilson en personne qui se dévouait en donnant le sien en ces termes: «Je le sais particulièrement apte à occuper la place, de par ses qualifications, son talent et sa personnalité». S’emballant dans sa plaidoirie, Wilson ajoutait lyrique:

… Il est exceptionnellement compétent. On ne saurait exagérer son impartialité, son désintéressement, son esprit méthodique, sa puissance d’analyse, sa profonde humanité, sa connaissance approfondie des fondements historiques de nos institutions et de leur esprit, ni ignorer à quel point il est imprégné de tout l’idéal américain de justice et d’égalité des chances, ignorer sa connaissance des conditions économiques modernes et la façon dont elles pèsent sur les masses, ignorer son génie à faire s’unir harmonieusement dans l’action, à faire se comprendre et respecter entre elles, les personnes les plus antagonistes qui soient. Cet ami des hommes et de la justice sera le joyau et le couronnement de l’institution dont nous sommes si justement fiers. Je suis heureux d’avoir pu lui rendre ce témoignage de mon admiration et de ma confiance …

C’est curieux, on en oublierait presque que c’était surtout l’occasion de s’acquitter d’une petite ardoise envers son créancier, Samuel Untermyer, lequel détenait des lettres au sujet d’une coucherie avec la voisine de palier …

Mais soyons juste, Brandeis était déjà un fervent soutien de Wilson lors de sa première campagne, lui rédigeant les lignes les plus importantes de son programme économique au sujet de la «régulation de la compétition». Wilson reconnaîtra la contribution de Brandeis à la victoire et en fera son principal conseiller économique de1912 à 1916, c’est-à-dire de l’accession à la Maison-Blanche de Wilson à la nomination de Brandeis à la Cour Suprême. Durant ce bref laps de temps, cet «ami des hommes et de la justice» aura le temps de se faire la cheville ouvrière de la création de la Federal Reserve, une plaie pour le peuple américain et un siphon de richesse et de pouvoir pour les banquiers Juifs. En tout, Brandeis aura passé 23 ans à la Cour Suprême, toujours aussi moteur dans tous les mauvais coups «progressistes», on lui doit aussi une impulsion décisive dans la création de la Tchécoslovaquie, un véritable poignard dans le dos de l’Allemagne, à l’origine de la première crise internationale grave précédant la Seconde Guerre mondiale.

Que Brandeis soit imprégné à cœur de l’idéal américain, il faudrait donc en déduire que cet idéal est sioniste, car Brandeis, dès les débuts du mouvement aux USA, en est un fervent militant. Le 20 août 1914, il est élu président du Comité exécutif provisoire aux affaires sionistes qui siège à New York. Dans son livre, The Jewish Problem: How to Solve It, il soutient l’idée d’un foyer national juif, le livre contient le texte d’un discours qu’il a prononcé devant une assemblée de rabbins en 1915 où il expose l’essence de ses conceptions sionistes:

Le sioniste cherche à établir ce foyer en Palestine parce qu’il est convaincu que c’est l’aspiration profonde des Juifs depuis toujours et que cette aspiration est un fait d’une importance primordiale; elle est la manifestation même de la volonté de survivre d’un peuple conscient de son existence depuis trois mille ans, trois mille ans de foi, de civilisation, de culture, parsemées de figures illustres qui sont autant de gages des progrès futurs de la civilisation: ce n’est pas simplement un droit, mais un devoir pour la nation juive que de perdurer et de se développer. Le sioniste pense que seule la Palestine peut lui offrir un sanctuaire contre les forces de désintégration, que c’est là seulement que l’âme juive peut atteindre à sa plénitude, il pense qu’en offrant un refuge aux Juifs qui choisiront de s’y installer, cela ne profitera pas seulement à eux, mais à l’ensemble des Juifs de par le monde en réglant une fois pour toute le lancinant problème juif.

Il est incontestable qu’Israël n’a pas cessé de faire l’actualité mondiale depuis sa création en 1947, mais que cela soit dans le sens de l’une ou l’autre des augures de Brandeis, cela reste quand même à démontrer, surtout lorsqu’il ajoute:

Dans les colonies juives de Palestine il n’y a pas de place pour les criminels, tous, jeunes ou vieux, se montrent à la hauteur de la gloire leur race, de son idéal et des devoirs qui en découlent. La Palestine est en train de devenir un foyer de scientifiques, d’inventeurs, de fondateurs et d’artisans …

Ce n’est pas pour faire inutilement de la peine à Brandeis, mais ce n’est pas l’avis de tout le monde, voir Israel: A Refuge for Swindlers, ou Israël, Terre d’Asile de la Grande Arnaque.

Rabbin Stephen Wise, agent d’influence

Même un bref aperçu de l’anneau enserrant Wilson ne peut faire l’impasse sur Stephen Wise. L’entrée le concernant dans Holocaust Encyclopedia le montre assez bien:

Contrairement à la plupart des rabbins et fidèles réformés de l’époque, Wise s’est résolument engagé en faveur de la création de l’État d’Israël. Cela faisait suite, disait-il, à sa première rencontre avec Theodor Herzl lors du second congrès sioniste en 1898, congrès durant lequel Wise était élu au Comité Sioniste d’Action Générale. En 1914, il devient l’adjoint de Louis Brandeis lorsque celui-ci prend la tête de l’American Zionist movement. L’action conjuguée des deux hommes aura une influence déterminante sur  la décision du président Woodrow Wilson de soutenir la déclaration de Balfour en 1917, déclaration par laquelle la Grande-Bretagne s’engageait à faciliter l’établissement d’un foyer national juif en Palestine. Wise fondait l’American Jewish Congress en 1920, devenait président de la Zionist Organization of America en 1936 et continuant de jouer un rôle clé au sein de la communauté juive en Amérique jusqu’à la fin de sa vie.

 

Ce soutien de Wilson à la déclaration de Balfour n’avait pas seulement pour but de forcer la Grande-Bretagne à tenir sa parole, mais elle était aussi implicitement un appel aux sionistes américains à retourner en faveur de l’entrée en guerre une opinion publique américaine encore largement isolationniste: les sionistes contre les isolationnistes, en quelque sorte. Un rôle central dans ce lavage de cerveau à grande échelle sera tenu par Edward Bernays, le neveu de Freud, tenez-vous bien, à double titre:

– son père, Ely Bernays (1860-1923), est le frère de Martha Bernays, l’épouse de Freud,

– sa mère, Anna Freud (1858-1955) est l’une des sœurs de Freud

(et c’est ce genre d’individus qui viennent nous dire qu’on veut tuer notre père pour coucher avec notre mère).

Paul Warburg met sur pied la Federal Reserve, la «Money Trust»

La loi portant création de la Federal Reserve est promulguée le 23 décembre 1913. Comme nous l’avons évoqué, Brandeis, en tant que premier conseiller économique de Wilson, n’y était pas pour rien, mais il n’était pas le seule de la «bande» à avoir porté sur les fonts baptismaux ce véritable «Money Trust» de droit privé, le premier nom qu’il faut avoir à l’esprit, c’est celui de Paul Warburg, né à Hambourg dans une famille de banquiers juifs allemands: c’est lui l’architecte de la FED.

La FED est une machine à création monétaire et à dette, mais attention, en soi, c’est une bonne chose, c’est la clé de voûte d’une économie monétaire et sans monnaie, il n’y a pas d’économie du tout, la dette n’est pas un trou noir dans lequel on va tomber, ce n’est pas une hypothèque sur les générations futures, chaque génération ne consomme que ce qui est disponible à un moment, s’il y 100 bananes disponibles, il n’y a aucune façon «monétaire» d’en consommer 101.

Ce qui pose problème, c’est à qui on confie les clés du camion et qui tient le volant, qui contrôle la création monétaire et à qui elle profite en premier. Le véritable scandale de la FED, c’est que cette banque centrale est en réalité une institution privée, un consortium de banques principalement aux mains de qui on sait. L’institution est vaguement encadrée par le Treasury Department, mais ce Department est souvent aux mains des mêmes et ce «contrôle» ne fait en réalité qu’amplifier le bénéfice qu’ils peuvent tirer de la FED en leur donnant par avance les orientations de la politique monétaire.

Pour savoir «qui mais qui» autour de Wilson ont mené le bal de la création de la FED, nous nous appuyons sur le travail de référence d’Eustace Mullins, Secrets of the Federal Reserve  En premier lieu, il convient de relever les indices selon lesquels c’est justement la position de Wilson en faveur de la création de la FED qui lui a permis de gagner l’élection présidentielle:

Le sénateur LaFollette faisait observer dans ses mémoires que son discours contre le Money Trust lui avait coûté la course à la présidence, tout comme à l’inverse, le soutien de Woodrow Wilson au plan Aldrich (premier projet de banque centrale en Amérique) lui a valu d’être pris en considération pour le bureau ovale. (p 16)

Comme l’opinion publique américaine était en grande partie opposée à ce «Money Trust», la Chambre mettait en place le comité Pujo pour enquêter sur la puissance des banquiers de Wall Street.

L’homme qui à lui seul s’est occupé de mener les auditions n’était autre que Samuel Untermyer, l’un des principaux donateurs de la campagne présidentielle de Woodrow Wilson’s Presidential …

Les banques internationales telles que celles d’Eugene Meyer, Lazard Frères, J. & W. Seligman, Ladenburg Thalmann, des frères Speyer, M. M. Warburg, et celle des frères Rothschild n’ont pas éveillé la curiosité de Samuel Untermye, et ce, bien qu’il soit parfaitement connu des milieux financiers new-yorkais que toutes ces dynasties bancaires avaient soit des établissements, soit des filiales sur la place de Wall Street. Lorsque Jacob Schiff s’est présenté devant le Pujo Committee, les questions adroites de Mr. Untermyer lui ont permis d’esquiver tranquillement toute révélation sur les opérations bancaires de la Kuhn Loeb dont il était le principal associé et que le sénateur Robert L. Owen avait identifié comme la branche américaine des Rothschild. (p 17)

Les auditions du Congrès ont montré qu’au sein de la Kuhn Loeb, Felix Warburg soutenait Taft, Paul Warburg et Jacob Schiff Wilson. Résultat des courses, un Congrès et un président démocrate étaient élus en 1912 avec mission principale de faire passer la loi de création de la banque centrale. … Col. Garrison, agent à la Brown Brothers bankers, par la suite Brown Brothers Harriman, rapporte dans son livre que «le Federal Reserve Act était l’œuvre de Paul Warburg et qu’il avait été adopté après l’échec du plan Aldrich qui avait suscité une véritable levée de bouclier à l’échelle nationale. Le cerveau des deux plans étant de toute façon le Baron Alfred Rothschild depuis Londres». (p 18)

(Plan Aldrich de 1912 du nom du Sen. Nelson W. Aldrich de Rhode Island. Il aurait également institué un cartel bancaire, mais n’a pas réussi à passer, c’est le fameux Glass Act de 1913 qui parviendra enfin à créer la Fed.)

Non seulement tous ces banquiers étaient Juifs,  mais tous — les Warburgs, Schiff, Kuhn, Loeb et Rothschild — comme chez les Freud, entretenaient des liens familiaux croisés et faisaient tous partie de la même famille élargie. Il ne fait aucun doute qu’ils ont tous travaillé conjointement à l’élection de leur candidat, Woodrow Wilson.

La vitesse à laquelle le Federal Reserve Act a été passé par le Congrès durant ce qu’on a appelé le «Christmas massacre» a même pris au dépourvu Woodrow Wilson: comme d’autres, il s’était entendu dire que le vote ne pourrait pas intervenir avant Noël, au dernier moment il tentait de ralentir le mouvement et refusait de signer parce qu’il n’était pas d’accord avec les dispositions prévues pour l’élection des directeurs de classe B. … Bernard Baruch, autre gros contributeur de la campagne de Wilson, en était abasourdi, il se précipitait à la Maison-Blanche pour dire à Wilson qu’il s’agissait d’un problème secondaire qui serait facilement résolu par «voie réglementaire», l’important c’était de passer coûte que coûte le Federal Reserve Act. Wilson cédait et signait in extremis, le 23 décembre 1913.  L’histoire montrera que ce jour-là, la constitution avait cessé d’être le pacte régissant le peuple américain et que ses libertés avaient été remises entre les mains d’un petit groupe de la finance internationale. (pp 28-9)

Et une banque centrale, ça sert à faire la guerre, Napoléon avait créé la sienne le18 janvier 1800 (la Banque de France), c’est d’ailleurs ce Bernard Baruch (Juif), si pressé de faire signer Wilson, qui va diriger l’industrie de guerre américaine comme nous allons le voir maintenant.

La déclaration de Balfour précipite l’Amérique de Wilson dans la guerre

Reprenons le discours de Freedman là où nous l’avions laissé:

… Les Juifs étaient bien contents quand l’Allemagne gagnait la guerre, ils ne voulaient pas que la Russie sorte gagnante aux côtés de la France et de l’Angleterre parce qu’ils pensaient que cela aggraverait la situation de leurs coreligionnaires dans le pays. Ils étaient donc tous pro-Allemand au départ, alors que s’est-il passé? C’est quand les Allemands ont commencé à sortir leurs sous-marins … Panique à Londres, le général Haig alertait les  Anglais de la situation: «Nous n’avons plus que deux semaines de réserves alimentaires devant nous pour un pays de 55 000 000 d’habitants»… Et alors l’Allemagne s’amenait avec son traité de paix … Le traité était sur le bureau du British War Cabinet, il n’y avait plus qu’à le signer…. De nouveau, que s’est-il passé? Les Khazars de New York et de Washington, emmenés par Brandeis, ont fait cette offre en passant par la Fleischman & Sockloff de Londres. Ils sont allés au War Cabinet et ils leur ont dit: «Pas besoin de signer une paix de capitulation, il y a un moyen de gagner la guerre, mais il vous faudra, une fois que vous aurez vaincu l’Allemagne et dépecé l’Empire Ottoman, nous donner la Palestine. Et ils ont conclu le marché par écrit, c’était la déclaration de Balfour. … La contrepartie de la Palestine, c’était la promesse d’user de leur influence pour jeter les États-unis dans la guerre. C’est ainsi qu’ils vont remercier les États-unis, de la même manière qu’ils vont remercier l’Allemagne, après tout ce qu’elle avait fait pour eux depuis 1822, en les faisant se battre entre eux, ce qui signifiait évidemment la défaite de l’Allemagne alors qu’elle était en train de gagner et pouvait espérer une paix avantageuse.

Wilson avait pourtant fait sa campagne sur le slogan «nous n’irons pas à la guerre». Mais à peine un peu plus d’un mois après le début de son second mandat, le 12 avril 1917, Wilson lançait un appel vibrant devant le Congrès pour qu’il fasse une déclaration de guerre officielle. Quelques jours plus tard, les deux Chambres votaient la guerre à une écrasante majorité. Ils n’ont été que quelques-uns à dire non, parmi eux, George Norris (R-Neb.), qui dira «nous allons à la guerre sur l’ordre du Dieu d’Or». Et au-dessus du Dieu d’or, il y avait les financiers juifs de Wall Street, et ils en voulaient plus par la guerre.

[la principale réserve qu’on peut adresser à la théorie de la déclaration de Balfour en échange de l’entrée en guerre des USA, c’est qu’elle ne correspond pas tout à fait avec la succession des dates, voir plus bas en annexe, la déclaration date du 2 novembre 1917, or, Pershing arrive à Paris le 13 juin 1917, le 4 juillet, la première brigade américaine débarquée à Saint-Nazaire est passée en revue à Paris par Poincaré. Cela dit, les négociations ont pu avoir lieu et aboutir avant leur officialisation, il est clair que les Anglais avaient à l’époque d’autres chats à fouetter que de s’occuper de la Palestine, l’Entente étant effectivement en difficulté du fait du transfert massif des troupes allemandes et autrichiennes du front Est vers le front Ouest suite à la révolution russe, dans ce contexte, la déclaration tombe un peu comme un cheveu sur la soupe, sauf s’il y a eu le marchandage dont parle Freedman, du reste, ce que nos Américains ne savent pas et qui n’est pas tellement passé dans l’histoire universelle, c’est que la France avait fait le même type de déclaration que Balfour, mais 5 mois plus tôt:

Le 4 juin 1917, Jules Cambon, alors secrétaire général du Quai d’Orsay, signe une lettre adressée à Nahum Sokolow,un dirigeant du mouvement sioniste qui soutenait publiquement l’établissement d’un foyer national juif en Palestine. Cette lettre précède de cinq mois la déclaration devant le Parlement de Lord Arthur Balfour, ministre britannique des Affaires Étrangères, à laquelle la France s’associe le10 février 1918, par l’intermédiaire de son propre ministre des Affaires étrangères, Stephen Pichon et qui est consacrée officiellement par le traité de Sèvres du10 août 1920. Comme quoi, le brouillard de guerre, ce n’est rien à côté du brouillard diplomatique …]

Bernard Baruch, le «Shtadtlan» du Nouveau Monde

Bernard Baruch avait amassé une fortune en jouant à la bourse de New York. En 1916, Wilson le plaçait à la tête de la Commission consultative du Conseil de la défense nationale, puis, au moment de l’entrée en guerre, il passait président du conseil des industries de guerre. Anthony Sutton nous raconte la suite:

En mars 1918, le président Wilson agissant sans l’aval du Congrès, avait doté Baruch de pouvoir comme jamais aucun autre dans l’histoire des États-unis. Le War Industries Board, avec Baruch à sa tête, était chargé de la construction de toutes les usines, de l’approvisionnement de toutes les matières premières, des produits, de leurs transports, et dans le Conseil, c’est Baruch en tant que président qui avait le dernier mot. En résumé, il était devenu le dictateur économique des États-unis …

Il y a une logique dans la trajectoire du bonhomme: il enjoint Wilson à créer la Fed, la Fed peut financer la guerre, il se fait nommer à la tête de l’effort de guerre américain, et il passe à la caisse avec ses petits copains.

Henry Ford notait dans son livre The International Jew (TiJ)

l’ampleur de l’influence juive sur Woodrow Wilson: «Ils l’enserraient dans un solide anneau de fer». Analysant les accès privilégiés à Wilson des journalistes juifs, en particulier de David Lauwrence, le TiJ déclare: «il est arrivé un moment où il ne s’adressait plus au pays qu’à travers eux». Le TiJ donne des exemples de Juifs impliqués dans des affaires de corruption,  attribuant ces affaires au pouvoir discrétionnaire de Bernard Baruch.

Conclusion

De nos sources historiques, nous pouvons conclure que Woodrow Wilson, 28e Président des État-unis de 1913 à 1921, était sous l’emprise de Juifs puissants qui le tenaient par le chantage, les dettes, l’intimidation, la corruption, la flatterie et la subversion idéologique. Wilson avait de gros soucis d’argent, tout particulièrement, comme le montrent ses lettres à Mary Peck, durant son premier mandat. Les Juifs ont su tirer parti de ses faiblesses pour en faire un pion dans leurs jeux de pouvoir et d’argent.

Wilson lui-même avait fini par se rendre compte qu’il était la marionnette et non pas le marionnettiste, voici ce qu’on trouve dans le recueil de ses discours, The New Freedom publié en 1913:

Aux États-Unis, même les plus grands hommes d’affaires sont effrayés par quelque chose, par quelqu’un. Ils savent qu’il existe une puissance occulte qui gît quelque part dans l’ombre, discrète, mais puissamment organisée, elle voit tout, elle sait tout, sa toile s’étend partout, c’est à peine s’ils osent s’en plaindre en chuchotant à demi-mots.

Adaptation française, Francis Goumain

Source

Jewish Control of US Presidents #1: Woodrow Wilson – The Occidental Observer

Annexe

la principale réserve qu’on peut adresser à la théorie de la déclaration de Balfour en échange de l’entrée en guerre des USA, c’est qu’elle ne correspond pas tout à fait avec la succession des dates, la déclaration date du 2 novembre 1917, or, Pershing arrive à Paris le 13 juin 1917, le 4 juillet, la première brigade américaine débarquée à Saint-Nazaire est passée en revue à Paris par Poincaré. Cela dit, les négociations ont pu avoir lieu et aboutir avant leur officialisation, il est clair que les Anglais avaient à l’époque d’autres chats à fouetter que de s’occuper de la Palestine, l’Entente étant effectivement en difficulté du fait du transfert massif des troupes allemandes et autrichiennes du front Est vers le front Ouest suite à la révolution russe, dans ce contexte, la déclaration tombe un peu comme un cheveu sur la soupe, sauf s’il y a eu le marchandage dont parle Freedman.

Voici la chronologie qu’on trouve dans les mémoires de Poincaré:

4 février 1917:

Jules Cambon téléphone à l’Élysée que M. Sevastopoulo a reçu de l’ambassadeur de Russie à Washington avis que le président Wilson a réuni une commission composée de quelques amis et qu’il y a examiné trois points:

1 – négociations entre les États-Unis et l’Allemagne

2 – attente d’un nouveau torpillage avant toute décision

3 – rupture immédiate des relations diplomatiques.

Wilson aurait choisi  ce dernier parti. Des télégrammes de presse disent qu’il aurait envoyé un nouveau message au Sénat et déclaré qu’il allait remettre ses papiers à l’ambassadeur d’Allemagne en faisant appel aux neutres. Si ces nouvelles sont exactes, le concours des  États-Unis va être pour nous  un appoint moral inappréciable.

[FG, dommage, Poincaré ne nous donne pas le nom des «amis» en question, mais d’après l’article ci-dessus, on peut songer à quelques pistes … ]

31 mars 1917, rencontre avec le prince Sixte qui a remis un message de l’Empereur Charles (d’Autriche) à Poincaré et à Cambon (secrétaire général du Quai d’Orsay), il leur laisse aussi une note personnelle faisant allusion au changement de régime à Petrograd:

«Jusqu’au changement de régime qui vient de se produire à Petrograd, l’opinion russe paraissait, en effet, unanime à réclamer la possession de Constantinople comme une condition essentielle  du développement de l’Empire moscovite. Mais les sentiments du gouvernement russe actuel marquent dès maintenant  des divergences à cet égard. Si le ministre des Affaires étrangères M. Milioukov, garde le point de vue précédent, qui était celui d’une annexion de Constantinople à la Russie, son collègue, M. Kerensky, reflète l’opinion nouvelle que la Russie doit renoncer à tout agrandissement: dans ce cas, la Turquie pourrait garder sa capitale dont il suffirait de combiner le régime avec un statut international européen».

5 avril 1917, échange de télégrammes entre Poincaré et Wilson:

La chambre des députés a adopté une résolution analogue à celle du Sénat. Pour protéger les Américains contre les attentats dont ils restent menacés, Wilson a fait armer des torpilleurs qui ont été dirigé vers les eaux américaines. L’un deux vient d’être coulé dans la Manche par un sous-marin allemand.

Ribot prononce à la Chambre sur la détermination américaine  un discours très applaudi.

Je télégraphie, de mon côté, au président Wilson. M. William Martin communique le télégramme que j’ai rédigé à Ribot, qui y donne sa pleine adhésion:

«Au moment, dis-je, où sous la généreuse inspiration de votre Excellence, la grande République américaine, fidèle à son idéal et à ses traditions, s’apprête à défendre par les armes la cause de la justice et de la liberté, le peuple français tressaille d’une émotion fraternelle. Laissez-moi vous renouveler, monsieur le Président, à cette heure grave et solennelle, l’assurance des sentiments dont je vous ai récemment adressé le témoignage et qui trouve dans les circonstances présentes un accroissement de force et d’ardeur. Je suis sûr d’exprimer la pensée de la France tout entière en vous disant, à vous et à la nation américaine, la joie et la fierté que nous éprouvons à sentir nos cœurs battre, une fois encore, à l’unisson avec les vôtres. Cette guerre n’aurait pas eu sa signification totale, si les États-Unis n’avaient pas été amenés par l’ennemi lui-même à y prendre part.

Dorénavant, il apparaît plus que jamais à tout esprit impartial  que l’impérialisme allemand, qui a voulu, préparé et déclaré la guerre, avait conçu le rêve insensé d’établir son hégémonie sur le monde. Il n’a réussi qu’à révolter la conscience de l’humanité. Vous vous êtes fait devant l’univers, en un langage inoubliable, l’éloquent interprète du droit outragé et de la civilisation menacée. Honneur à vous, Monsieur le Président, et à votre noble pays.

Je vous prie de croire à mon amitié dévouée.                                                                                                            Raymond Poincaré»

Réponse de Wilson:

«His Excellence Raymond Poincaré, President of the Republic, Paris.

In this trying hour when the destinies of civilized mankind are in the balance, it has been a source of gratification and joy to me to receive your congratulations upon the step which my country has been constrained to take, in opposition to the relentless policy and course of imperialistic Germany. It is very delightful to us that France who stood shoulder to shoulder with us of the western world in our struggle for independence, should now give us such a welcome into the lists of battle as upholders of the freedom ant the rights of humanity. We stand  as partners of the noble democraties whose aims and acts make for the perpetuation of the rights and freedom of man  and for the saveguarding of the true principales of human liberties in the name of the american people. I salute you and your illustrious countrymen.

Woodrow Wilson»

Le journal officiel  du 11 avril 1917 a donné dans les termes suivants la traduction française de ce télégramme:

«Son Excellence Monsieur Raymond Poincaré, Président de la République, Paris.

En cette heure critique où les destinées de l’humanité civilisée sont en suspens, cela a été pour moi un sujet de satisfaction et de joie de recevoir vos félicitations à propos de la conduite que mon pays a été contraint d’adopter, en opposition  à la politique impitoyable et aux procédés de l’Allemagne impérialiste. Il nous est très agréable que la France, qui s’est tenue coude à coude avec nous autres, hommes du monde occidental, dans notre lutte pour l’indépendance, nous souhaite ainsi la bienvenue aujourd’hui dans les rangs de ceux qui combattent pour la défense de la liberté et des droits de l’humanité. Nous voici debout comme champions des nobles démocraties dont les desseins et les actes contribueront à perpétuer les droits de l’indépendance de l’homme et à sauvegarder les vrais principes des libertés humaines.

Au nom du peuple américain, je vous salue, vous et vos illustres compatriotes.

Woodrow Wilson»

[FG: remarque, à la date du 4 juin, il n’y a rien sur la lettre de Cambon à Nahum Sokolow – l’équivalent de la déclaration de Balfour pour la France –  mais Poincaré n’est jamais très franc dès qu’il s’agit des Israélites]

13 Juin 1917 Pershing arrive à Paris:

Le général américain Pershing est arrivé à Paris à la fin de l’après-midi. Le colonel Renoult, de ma maison militaire, est allé au-devant de lui à la gare. Il me dit que l’accueil a été très chaleureux.

4 juillet 1917, revue d’un premier bataillon américain le jour de la fête nationale américaine:

Dans la matinée, cour des Invalides, revue d’un bataillon américain, qui vient d’arriver à Paris. Painlevé vient me chercher à l’Élysée et nous partons tous deux en victoria. Le général Duparge, le colonel de Rieux et le commandant Helbronner nous suivent en landau. Sur le pont Alexandre III et sur l’esplanade, foule très dense et unanimement enthousiaste.

Nous arrivons devant l’Hôtel des Invalides et nous mettons pied à terre. Nous sommes reçus par le général Pershing et le général Dubail. Nous entrons dans la cour, autour de laquelle sont rangés les soldats américains et une compagnie française.

Sous les arcades et au premier étage, dans les galeries, beaucoup de spectateurs et spectatrices qui applaudissent. Nous passons devant les troupes qui ont très bon air dans leurs uniformes kaki.

Forbes a discuté des spéculations de certains experts : Vladimir Poutine serait secrètement heureux du crépuscule des oligarques juifs

  • Je partage ci-dessous un article écrit par Andrew Joyce, Ph.D., et qui fut publié à l’origine dans le magazine en ligne The Occidental Observer le 22 avril 2022. Andrew Joyce, Ph.D. est un universitaire, conférencier et écrivain possédant une expertise universitaire en immigration, en conflits ethniques et religieux et en philosophie. 
Personnellement, je vous invite à prendre en considération que je remplace le mot « juif » par le terme « khazar », ce qui est plus approprié selon moi. Je vois aussi des liens avec certains aspects de mon livre « L’Arche de Gabriel : de La Mecque à l’Antarctique ».

Traduit par Guy Boulianne. https://www.guyboulianne.info/2022/04/25/forbes-a-discute-des-speculations-de-certains-experts-vladimir-poutine-serait-secretement-heureux-du-crepuscule-des-oligarques-russes 

Le sujet des Juifs et de l’argent est controversé et essentiel, mais pas sans ses aspects sombres et comiques. En novembre, j’ai écrit un essai sur la critique de Dracula de Bram Stoker pour ses prétendues qualités antisémites, et j’ai noté l’angoisse d’un universitaire à propos d’une scène dans laquelle Jonathan Harker frappe Dracula avec un couteau, coupant le manteau du vampire et envoyant un flot d’argent au sol. Au lieu de fuir immédiatement, Dracula attrape des poignées d’argent avant de sprinter à travers la pièce. L’universitaire offensée, Sara Libby Robinson, s’est plainte que « cette démonstration de mettre la préservation de son argent sur un pied d’égalité avec la préservation de sa vie montre que les stéréotypes concernant les Juifs et leur argent étaient bien vivants à la fin du XIXe siècle ».

Ceux qui passent suffisamment de temps à observer les Juifs, cependant, sauront que la chose curieuse à leur sujet est que les stéréotypes associés ont une étrange habitude de trouver une confirmation empirique constante. Prenez, par exemple, un récent article de presse soulignant qu’Israël a connu un afflux de réfugiés juifs depuis l’invasion de l’Ukraine par Poutine le 24 février. L’impact est que l’afflux a impliqué beaucoup plus de réfugiés économiques de Russie, qui demandent un allègement des sanctions occidentales et la baisse des valeurs monétaires, que les Juifs ukrainiens cherchant à se protéger de la violence. Confrontés à la guerre, les Juifs « mettent vraiment la préservation de leur argent au même niveau que la préservation de leur vie ». Dans l’une de mes anecdotes préférées sur la crise ukrainienne jusqu’à présent, l’avocat russo-israélien de l’immigration Eli Gervits affirme avoir reçu des milliers d’appels de Juifs russes lançant un appel qu’il appelle SOS : « Sauvez nos économies ». Cette histoire remarquable est emblématique du fait que la guerre de Poutine en Ukraine est un net négatif pour l’oligarchie juive internationale basée en Russie et les réseaux juifs internationaux qui survivent et prospèrent grâce à leur patronage.

La chute de Viatcheslav Moshe Kantor

Peu de choses m’ont remonté le moral ces derniers temps, comme la nouvelle selon laquelle le gouvernement britannique a finalement imposé des sanctions à Moshe Kantor. Milliardaire russe, oligarque pernicieux et ancien président de pas moins que le Congrès juif européen, le Conseil européen sur la tolérance et la réconciliation, la Fondation du Forum mondial de l’Holocauste, le Fonds juif européen et le Conseil politique du Congrès juif mondial, Kantor est la quintessence de l’activiste juif fortement identifié, pleinement engagé dans la promotion des intérêts de son groupe ethnique. Sioniste dévoué, Kantor est citoyen d’Israël, ainsi que de la Russie et du Royaume-Uni. Kantor, avec son curieux mélange de nationalités, n’a pas tant chevauché l’Est et l’Ouest qu’il n’a utilisé le pillage dans le premier pour alimenter l’activisme dans le second. L’un de ses principaux projets ces dernières années a été de faire pression sur l’Union européenne pour de plus grandes restrictions à la liberté individuelle et pour l’imposition d’un vaste appareil draconien pour la protection et l’application du multiculturalisme à travers le continent. Dans son traité « The Manifesto on Secure Tolerance », Kantor écrit avec un flair orwellien que « les restrictions sont nécessaires pour la liberté de vivre une vie en sécurité ». En lisant entre les lignes, le message devient plus clair : « Les restrictions imposées aux Européens sont nécessaires pour que les Juifs puissent vivre une vie en toute sécurité ». Parmi les propositions de Kantor figuraient la création d’un appareil à l’échelle du continent pour la surveillance d’Internet ciblant les opposants au multiculturalisme, la promotion forcée et l’« éducation » sur le multiculturalisme à travers l’Europe, et une augmentation significative des peines de prison pour toutes les infractions contre le culte de la diversité.

Kantor a échappé à la vague de sanctions occidentales contre les élites russes (souvent juives) jusqu’à la semaine dernière, mais a finalement été pris pour cible en raison de son rôle de principal actionnaire de la société d’engrais Acron, qui entretient des liens stratégiques avec le gouvernement russe. Inutile de dire que la sanction d’un autre de leurs oligarques extrêmement influents envoie des ondes de choc dans les institutions juives internationales qui dépendent de la richesse et de l’influence de ces personnalités. Le 6 avril, le Congrès juif européen, le principal véhicule de Kantor pour faire avancer sa guerre contre les libertés européennes, a publié une déclaration soulignant qu’il était

Profondément choqué et consterné par la décision prise aujourd'hui par le gouvernement britannique de sanctionner le Dr Moshe Kantor, président du Congrès juif européen, de la Fondation du Forum mondial de l'Holocauste et du Conseil européen pour la tolérance et la réconciliation. La décision est erronée et n'a aucun fondement factuel ou fondé sur des preuves. Le Dr Kantor est un citoyen britannique qui vit depuis plus de trois décennies en Europe occidentale, dont de nombreuses années au Royaume-Uni. C'est un dirigeant juif de longue date et respecté, qui a consacré sa vie à la sécurité et au bien-être des communautés juives d'Europe et à la lutte contre l'antisémitisme, le racisme et la xénophobie. … Nous appelons à ce que cette décision soit annulée dès que possible.

La déclaration la plus récente publiée par le gouvernement britannique est peu détaillée, déclarant seulement que Kantor sera soumis à un « gel des avoirs ». Étant donné que Kantor possède et passe beaucoup de temps dans un manoir important sur Winnington Road à Londres, où les prix de l’immobilier dépassent en moyenne 8 millions de dollars, ce sera certainement un point sensible pour l’oligarque. Beaucoup plus inquiétant pour Kantor, c’est que l’Union européenne a emboîté le pas quelques jours plus tard, en déclenchant ses propres gels d’avoirs et interdictions de voyager. Ses comptes bancaires, ses maisons et ses autres intérêts économiques à travers le continent ont été bloqués.

La Hongrie et l’Autriche, influencées par les sympathies sionistes, ont toutes deux tenté de sauver Kantor des sanctions, l’envoyé hongrois exprimant « sa surprise face à l’inscription sur la liste noire de quelqu’un qu’il a décrit comme un homme hautement décoré ». Cependant, la stratégie de clôture de Kantor consistant à être un pivot oriental et un prédicateur multiculturaliste occidental a été démolie par le conflit en Ukraine. Comme un jeu de chaises musicales, il constate que la musique s’est arrêtée et qu’il reste debout, les mains pleines d’actifs russes qui étaient autrefois si précieux et essentiels à son pouvoir. Ironiquement, les envoyés de l’Estonie et de la Lituanie, deux pays accusés d’antisémitisme et de fascisme par la Russie, ont exhorté avec succès leurs partenaires à ne pas retirer Kantor, l’un des militants juifs les plus influents d’Europe, de la liste. Et donc le pauvre Moshe, qui a proposé autrefois que les restrictions étaient une voie vers la liberté, devra désormais vivre selon ses propres mots. Alors que ses maisons et ses biens sont saisis par les gouvernements européens, que la valeur de ses entreprises décline et qu’il se retrouve avec moins d’endroits où aller, je ne peux qu’offrir à Moshe l’assurance de son propre dicton :

Des restrictions sont nécessaires pour la liberté de vivre une vie en toute sécurité!

Stadtlans à l’honneur

En tant que chef de tant de groupes et acteur dans tant de hautes sphères, Kantor remplit les qualifications des premiers stadtlan modernes – les Juifs de cour du début de la période moderne qui se vantaient d’une richesse significative et de relations intensives avec les élites non juives. Et il illustre bon nombre des mêmes qualités, agissant toujours dans des rôles d’intercession non élus mais très influents, cherchant à améliorer les avantages tactiques et matériels de sa tribu. Regardez n’importe quel pays important et vous trouverez non seulement une clique juive installée au cœur de son appareil politique, mais souvent aussi un petit nombre d’individus juifs si influents qu’ils peuvent être considérés comme des acteurs politiques à part entière. Ces personnages sont la pointe de la lance de l’activisme juif, et dans le passé, ces hommes et leurs familles ont eu un tel impact sur le cours de l’histoire que leurs noms sont passés dans le langage courant – Rothschild, Schiff, Warburg, et des corollaires plus modernes tels que Soros, Adelson et la constellation de milliardaires juifs infestant l’Ukraine et en orbite autour de Vladimir Poutine.

Pour ces élites juives de l’Est, la guerre en Ukraine a eu le double effet inquiétant d’impacter leurs finances et de rehausser leur visibilité. Petr Aven, Mikhail Fridman, German Kahn, Roman Abramovich, Alexander Klyachin, Yuri Milner, Vadim Moshkovich, Mikhail Prokhorov, Andrey Rappoport, Arkady Rotenberg, Boris Rotenberg, Igor Rotenberg, Viktor Vekselberg, God Nisanov, Oleg Deripaska, Alexander Abramov, Gavril Yushvaev , Zarakh Iliev, Vladimir Yevtushenkov, Arkady Volozh, Eugene Schvidler, Leonid Simanovskiy, Yuri Shefler, Kirill Shamalov, Aleksandr Mamut, Lev Kvetnoy, Yevgeniy Kasperskiy, Yuriy Gushchin, Oleg Boyko, Leonid Boguslavskiy, ne sont que quelques-uns de ceux qui se sont cachés à la vue de tous pendant un certain temps, mais qui se retrouvent non seulement discutés, sanctionnés et mis sur liste noire, mais également regroupés dans des listes qui mettent en évidence les schémas surprenants de leur accumulation de richesse et de leur partenariat ethnique.

En 2018, le département du Trésor américain a publié une liste de Russes qu’ils envisageaient de sanctionner, et la liste a continué de provoquer un malaise dans les cercles juifs. Le Times of Israel a récemment tenté de minimiser la prééminence juive en affirmant qu’« au moins 18 des chiffres sur [la liste du Trésor] sont des oligarques juifs », tout en ajoutant que la liste se compose de 210 noms (ce qui signifie une représentation juive de 8,5 %). Mais ils ne mentionnent pas que le Trésor a séparé leur liste en 114 politiciens et 96 oligarques, et il y a en fait 29 oligarques juifs confirmés dans cette dernière liste, avec deux autres (Aras Algarov et Alisher Usmanov) mariés à des juifs et élevant des enfants juifs. En d’autres termes, au moins 30 % des oligarques les plus influents de Russie sont juifs dans un pays où les juifs représentent environ 0,1 % de la population. On ne peut honnêtement parler des oligarques orientaux sans parler à un certain niveau des Juifs.

Les Juifs milliardaires de Russie sont peut-être presque intouchables, mais ils craignent depuis longtemps que leur judéité ne devienne un sujet de discussion publique. En 1998, l’Irish Times a publié un article décrivant le début de la fin de l’ère Eltsine. Intitulé « La Russie se soumet au règne des sept banquiers », l’article expliquait que la Russie était tombée en grande partie entre les mains de six financiers juifs (Boris Berezovsky, Vladimir Guzinsky, Alexander Smolensky, Mikhail Khodorkovsky, Mikhail Fridman et Vitaly Malkin), et un Gentil symbolique (Vladimir Potanine). La partie la plus intéressante de l’article est la discussion de l’ancienne stratégie juive consistant à utiliser un leader européen pour déguiser la nature juive de la structure du pouvoir :

À l'approche des élections de 1996, les magnats ont contribué des millions de dollars à la campagne de réélection d'Eltsine, sous l'impulsion de Berezovsky, qui s'est vanté plus tard que les sept membres du club contrôlaient la moitié de l'économie russe. C'était une exagération, mais reflétait leur orgueil. Après l'élection, selon plusieurs sources, les magnats se sont rencontrés et ont décidé d'insérer l'un des leurs au gouvernement. Ils ont débattu de qui – et ont choisi Potanine, qui est devenu vice-premier ministre. L'une des raisons pour lesquelles ils ont choisi Potanine était qu'il n'était pas juif, et la plupart d'entre eux le sont. Ils craignaient un retour de bâton contre les banquiers juifs.

Le contrôle croissant de Poutine sur les oligarques juifs

Comme pour Eltsine, les sept banquiers, en particulier Berezovsky, ont d’abord prétendu avoir promu Poutine et insisté sur sa candidature aux postes de Premier ministre et de président. Comme l’a souligné le Guardian en 2013, le défaut fatal de Berezovsky était simple : il a mal interprété Poutine :

Berezovsky a rencontré Poutine au début des années 1990, lorsque l'espion du KGB travaillait pour le maire de Saint-Pétersbourg. Les deux ont socialisé et ont même skié ensemble en Suisse. À la fin des années 1990, Poutine était devenu le chef du FSB, l'agence qui a succédé au KGB. L'entourage d'Eltsine cherchait un successeur au président malade. Ils ont dépêché Berezovsky pour offrir le poste à Poutine – qui est devenu Premier ministre à l'été 1999, succédant à Eltsine en tant que président par intérim six mois plus tard. Berezovsky avait estimé que son ami serait un successeur souple - et que lui, l'ultime initié du Kremlin, continuerait à tirer les ficelles. Il est rapidement devenu évident que Poutine avait sa propre vision de la Russie : un endroit plus sombre, moins démocratique, dans lequel les agences d'espionnage du pays joueraient un rôle d'avant-garde, et avec Poutine aux commandes sans équivoque. Les deux se sont affrontés; Poutine a saisi la chaîne de télévision ORT de Berezovky ; et Berezovsky décampa à Londres. Leur querelle était méchante et conduirait finalement à la mort de Berezovsky à l'âge de 67 ans en exil.

D’autres membres de la Semibankirschina (Sept banquiers) ont été soit exilés, soit mis au pas. Gussinsky a quitté la Russie en 2000 à la suite d’accusations de détournement de fonds. Khodorkovsky a été arrêté par les autorités russes en 2003 et accusé de fraude. Il a purgé 10 ans de prison, au cours desquels sa fortune a été décimée, et il s’est enfui en Suisse puis à Londres à sa libération. Alexander Smolensky a vendu bon nombre de ses actifs, a abaissé son profil et aurait déménagé à Vienne. Vitaly Malkin est devenu un loyaliste extérieur de Poutine, tout en essayant pendant près de 20 ans de déménager au Canada, en investissant des millions à Toronto et en prenant la citoyenneté israélienne. Curieusement, Vladimir Potanine, le seul gentil parmi les Semibankirschina, a le plus prospéré sous Poutine, devenant l’homme le plus riche de Russie.

Mikhail Fridman, né en Ukraine, a suivi une trajectoire plutôt stable, se concentrant sur les questions financières, cultivant une personnalité Est-Ouest depuis son manoir londonien et évitant les affrontements politiques. Cependant, les roues ont récemment commencé à se détacher pour Fridman, grâce au conflit ukrainien et à son désir d’éviter des répercussions financières personnelles. Fridman a été l’un des premiers oligarques à exprimer clairement son opposition à la guerre et, dans une interview ultérieure avec Bloomberg, il a admis que sa déclaration décrivant le conflit comme une tragédie « pourrait rendre dangereux son retour en Russie ». L’interview de Bloomberg met en lumière le choc que Fridman a ressenti en se retrouvant isolé de la sphère occidentale malgré, comme Moshe Kantor, avoir investi des années dans un réseautage minutieux :

Rien de tout cela ne l'a aidé à éviter le sort de certains autres magnats russes. Ses années de réseautage aux États-Unis et en Europe non plus. Le 28 février, son avocat l'a retiré d'une réunion en lui annonçant que l'Union européenne l'avait sanctionné, ainsi que son partenaire commercial de longue date, Petr Aven [également juif], qui dirigeait Alfa-Bank, la plus grande banque privée de Russie et une banque clé du Consortium Alfa Group de Fridman. L'avocat a commencé à débiter ce que cela signifiait : interdictions de voyager, comptes gelés. Fridman pouvait à peine enregistrer les mots. « J'étais sous le choc », me dit-il. « Je n'ai presque pas compris ce qu'il disait. »

Fridman affirme que les sanctions sont politiquement inutiles car les oligarques n’ont aucune influence sur Poutine, seulement des relations d’affaires :

Ce qui est clair pour lui maintenant, dit-il, c'est que l'UE ne comprend pas comment fonctionne réellement le pouvoir en Russie. Si le but des sanctions est de motiver des gens comme lui à faire pression sur Vladimir Poutine, dit-il, c'est pire qu'irréaliste. « Je n'ai jamais été dans une entreprise d'État ou un poste d'État », déclare Fridman. « Si les responsables de l'UE croient qu'à cause des sanctions, je pourrais approcher M. Poutine et lui dire d'arrêter la guerre, et cela fonctionnera, alors j'ai bien peur que nous ayons tous de gros problèmes. Cela signifie que ceux qui prennent cette décision ne comprennent rien au fonctionnement de la Russie. Et c'est dangereux pour l'avenir. »

Les sanctions et autres impacts économiques de la guerre ont déjà anéanti un tiers de la richesse de Fridman, et bien qu’il soit toujours incroyablement riche, il est plus ou moins piégé à Londres et n’a pas accès à de l’argent. Stephanie Baker, interviewant Fridman pour Bloomberg, souligne qu’« il doit maintenant demander une licence pour dépenser de l’argent, et le gouvernement britannique déterminera si toute demande est ‘raisonnable’ ». Les organisations juives d’Ukraine ne cessent de l’appeler pour lui demander des progrès sur un don de 10 millions de dollars qu’il leur a promis mais qu’il ne peut plus honorer. Baker ajoute,

L'argument de Fridman selon lequel il n'est pas en mesure d'exercer une influence sur le Kremlin reflète la façon dont le rôle des milliardaires russes a été renversé depuis les années 1990. À l'époque, Fridman était l'un des sept oligarques d'origine, la semibankirschina. En tant que groupe, ils ont soutenu la campagne de réélection du président Boris Eltsine et ont dominé le Kremlin. Lorsque Poutine est arrivé au pouvoir en 2000, il a imposé son propre modèle : le nouveau pacte était que s'ils restaient en dehors de la politique, ils pouvaient continuer à gérer leurs entreprises. Poutine a détruit les oligarques qui ont violé cet arrangement.

L’incapacité de Fridman à contenir sa frustration face aux sanctions et sa volonté d’exprimer son opposition à la guerre pourraient bien marquer la fin de son implication directe dans la vie russe. Peut-être plus que tout autre oligarque, ses actions ont provoqué le discours désormais tristement célèbre dans lequel Poutine a attaqué les oligarques anti-guerre à la recherche de leurs propres intérêts économiques :

Le peuple russe sera toujours capable de distinguer les vrais patriotes des racailles et des traîtres et les recrachera simplement comme un moucheron qui a accidentellement volé dans leur bouche - les recrache sur le trottoir. … Je suis convaincu qu'une telle auto-épuration naturelle et nécessaire de la société ne fera que renforcer notre pays, notre solidarité, notre cohésion et notre capacité à répondre à tous les défis.

« Une auto-épuration naturelle et nécessaire de la société »

La nouvelle que des milliers de Juifs russes fuient vers Israël pour protéger leur argent, et les signes continus que de nombreux oligarques juifs maintenant hors de Russie pourraient ne jamais revenir, suggèrent que « l’auto-épuration naturelle et nécessaire de la société » de Poutine impliquera une réduction de la présence juive, de la richesse juive et de l’influence juive dans le pays. En plus des oligarques déjà mentionnés, il y a plusieurs milliardaires juifs, dont Boris Mints sur les listes russes les plus recherchées, pour une variété de crimes, y compris le détournement de fonds et la fraude. Leonid Nevzlin, un oligarque juif, ami de l’exilé Khodorkovski et ancien magnat du pétrole qui a fui la Russie en Israël il y a 20 ans afin d’échapper à une peine d’emprisonnement à perpétuité pour meurtre et crimes financiers, a récemment entrepris l’acte symbolique de renoncer à sa citoyenneté russe. Les demandes russes d’extradition de Nevzlin ont été ignorées à plusieurs reprises par Israël. Nevzlin a récemment déclaré à un journaliste : « J’ai été l’un des premiers à être frappé par Poutine. Il a jeté mes amis en prison et en a tué certains. »

L’un des aspects les plus fascinants de la carrière politique de Poutine est qu’elle combine un philosémitisme rhétorique et performatif souvent flamboyant avec des actions qui nuisent ou entravent directement les intérêts juifs. Comme mentionné dans un essai précédent, Poutine est l’un des principaux promoteurs européens du récit de l’Holocauste, mais c’est un récit de l’Holocauste nettement moins utile aux Juifs que la version hollywoodienne/Spielbergienne à laquelle nous sommes si habitués en Occident. C’est un récit de l’Holocauste dépouillé de l’exclusivité juive, imprégné de codes moraux géopolitiques favorables principalement à la Russie, et dirigé sans vergogne par et pour Moscou plutôt que Jérusalem. Dans un autre exemple curieux de rhétorique heurtant la réalité, en 2016, Poutine a invité les Juifs à venir s’installer en masse en Russie, sachant vraisemblablement très bien que des milliers de Juifs quittaient déjà la Russie à un rythme de plus en plus rapide. En 2014, plus du double du nombre de Juifs a quitté la Russie qu’au cours des 16 années précédentes.

L’une des forces de Poutine pour vaincre le pouvoir financier juif au plus haut niveau, ce qu’il a incontestablement fait, pourrait avoir son fondement dans le fait qu’il n’est pas un antisémite au sens classique. Il ne pense peut-être pas en termes raciaux, mais, en tant qu’ancien membre des services secrets, il est parfaitement à l’écoute des cliques, de l’intrigue, de la subversion et des subtilités de l’identité – les caractéristiques habituelles de l’activisme juif dans les cultures européennes. Il apparaît tout à fait capable d’éliminer de telles stratégies lorsqu’il les affronte sur une base individuelle et avec un pouvoir autocratique. Il peut déposer un Berezovsky, par exemple, non pas sur la base de la judéité, mais, néanmoins, sur certains comportements et associations qui sont une excroissance de la judéité. Ils disent qu’une horloge cassée sera toujours juste deux fois par jour, et de la même manière si l’on entreprend d’éliminer les stratégies de groupe opposées, même de manière « race aveugle », alors les confrontations avec les Juifs deviennent inévitables. De cette manière, Poutine est une sorte d’antisémite accidentel, ou plutôt accessoire, qui a dominé ou éliminé les financiers juifs dans son pays d’une manière probablement inédite depuis l’époque des Juifs de cour et la montée de la démocratie parlementaire.

Juifs en tant que bellicistes et pacifistes

Il y a une ironie dans la dernière situation difficile des financiers juifs de Russie étant donné que la guerre, historiquement, a été très bonne pour les Juifs. Pour cette raison, il vaut la peine de rechercher des précédents historiques et des parallèles. Derek Penslar, dans son livre Jewish and the Military (2013) publié à Princeton, souligne que les Juifs sont peut-être connus pour avoir évité le service militaire, mais qu’ils ont été prolifiques en profitant des conflits partout dans le monde :

Les Juifs étaient largement impliqués dans un système bancaire international qui tirait des profits considérables en prêtant des fonds directement aux gouvernements ou en emballant et en vendant la dette publique. Une grande partie de cette activité a eu lieu pendant ou à la suite de guerres. Pendant la guerre civile américaine, la dette du gouvernement de l'Union est passée de 65 millions de dollars à 3 milliards de dollars, soit environ 30 % du produit intérieur brut de l'Union. Une grande partie de cette dette était commercialisée sous la forme d'obligations d'État en petites coupures et achetées par des citoyens ordinaires. Les Rothschild avaient été les pionniers de cette pratique en France dans les années 1830, et le banquier Joseph Seligman l'a reprise aux États-Unis pendant la guerre civile. Après la guerre, les Seligman, ainsi que les banquiers Mayer Lehman et Jacob Schiff, ont énergiquement commercialisé des obligations américaines ainsi que celles des gouvernements des États du Sud à court de liquidités.

C’est Schiff qui a accordé quelque 200 millions de dollars de prêts au Japon pour alimenter ses objectifs expansionnistes en Extrême-Orient contre une Russie tsariste très détestée par les Juifs, et ce sont les Seligman qui « ont encouragé l’intervention des États-Unis » en Colombie en 1903 pour se tailler un Panama quasi indépendant, où les Seligman avaient investi dans des terres le long du futur tracé du canal. L’un des exemples les plus évidents et notoires d’une guerre pour les intérêts juifs est bien sûr la guerre des Boers, 1899-1902. L’Afrique du Sud avait été considérée comme un marigot rural par les Juifs jusqu’à une découverte de diamants en 1884 et la découverte d’or dans le Witwatersrand en 1887. Suite à ces événements, il y eut un afflux substantiel de commerçants juifs, qui devinrent rapidement une clique de millionnaires. Claire Hirschfeld, écrivant dans le Journal of Contemporary History, décrit comment les Juifs « ont pu, en un laps de temps relativement court, créer de puissants syndicats financiers et des empires étendus au sein d’une république boer d’agriculteurs encore accrochés à un style de vie pastoral ». Le pouvoir financier s’est rapidement transformé en un désir de domination politique, ce qui a nécessité le renversement des Boers. Cela nécessiterait l’utilisation de l’armée britannique, et Hirschfeld souligne qu’une grande partie de la fièvre de la guerre a été attisée par une presse britannique dominée par les Juifs : Oppenheim’s Daily News, Marks’ Evening News, Steinkopf’s St. James Gazette, et Levi-Lawson’s Daily Telegraph. L’un des principaux opposants à la guerre était le marxiste anglais Henry M. Hyndman, qui accusait les « seigneurs sémitiques de la presse » de harceler le gouvernement dans une « guerre criminelle d’agression » en Afrique du Sud. Il fut rejoint par le rédacteur en chef du journal Reynolds, W. H. Thompson, qui écrivit au début de la guerre :

Au bas de la guerre se trouvent les syndicats juifs et les millionnaires… comptant les poulets qui vont bientôt éclore. … La Bourse tire les ficelles et le gouvernement danse. Mais derrière la Bourse se cache la sinistre figure du Juif financier qui empêtre peu à peu le monde dans les tréfonds de la toile d'argent que la grande franc-maçonnerie raciale tisse jour et nuit aux quatre coins du globe.

Penslar reconnaît que les Juifs ont travaillé ensemble pour profiter de la guerre, écrivant que « c’est un fait, pas un fantasme antisémite, que les Juifs ont joué un rôle vital dans la coordination de l’allocation des matières premières pendant la Première Guerre mondiale, non seulement en Allemagne mais aussi dans le États-Unis. » Cela impliquait des cliques superposées de Juifs profitant de tous les aspects de la production de guerre.

À l’inverse, les Juifs peuvent basculer l’interrupteur pacifiste lorsqu’il est jugé que la guerre peut nuire à leurs intérêts. Penslar souligne que les Rothschild craignaient en 1914 qu’« une guerre puisse diviser la grande dynastie bancaire », tandis que Max Warburg commençait à vendre à la hâte ses actions dans des sociétés cotées à la bourse de Vienne. Le baron Rothschild a supplié le Times d’atténuer sa rhétorique anti-allemande, seulement pour que l’éditeur rétorque publiquement à cette « sale tentative financière juive allemande de nous intimider pour que nous défendions la neutralité ». Le magnat de la navigation juif allemand Albert Ballin regarda avec découragement sa flotte marchande couler au fond de l’Atlantique.

Conclusion

La guerre actuelle en Ukraine fait plus écho à Ballin qu’à la guerre contre les Boers. Face à l’invasion russe et à l’éternelle question « est-ce bon pour les juifs ? » les oligarques juifs dispersés de Russie répondraient probablement un « non » retentissant. La raison la plus importante serait, bien sûr, la baisse de leur richesse individuelle et collective. Des milliards ont été effacés de leurs comptes, leurs entreprises ont été entravées, leurs déplacements et leur capacité à faire des affaires sont restreints et leur accès à l’argent est limité. La nature de la finance internationale – politiquement, philosophiquement et technologiquement – ​​a évolué à un point tel que la profiterie juive à l’ancienne est plus difficile que jamais. En outre, cela a également rendu le ciblage individuel des financiers dans le contexte d’un conflit et d’une guerre non seulement faisable, mais facile et immédiat.

Les oligarques se retrouvent entre le marteau et l’enclume, considérés avec hostilité et suspicion par l’Occident, malgré des années de promotion de l’Holocauste et de philanthropie juive (comme si cela apportait réellement quelque chose à l’Occident), et de plus en plus éloigné et craintif du Kremlin. Le lieu d’installation naturel pour la plupart d’entre eux est Israël, qui lui-même essaie de cultiver une relation à la fois avec l’Est et l’Ouest, abandonnant l’un et flattant l’autre au gré de ses besoins. Même les Israéliens, cependant, considèrent les oligarques comme « toxiques » et ont été avertis par le gouvernement américain de ne pas prendre « d’argent sale ».

Forbes a discuté des spéculations de certains experts selon lesquelles Poutine est secrètement heureux du crépuscule des oligarques. Les sanctions peuvent les forcer à vendre des actifs qui profitent en fin de compte à ses agences de sécurité. Ou ils peuvent retourner en Russie et être forcés non seulement d’investir dans l’économie russe plutôt que de répandre leur richesse à l’échelle mondiale (comme des empires immobiliers à Londres, des yachts opulents, etc.), mais aussi d’adopter une position encore plus servile sous Poutine. La diminution des oligarques entraînera une vaste diminution des coffres des organisations juives internationales. Un puits financier clé se sera tari. La guerre de Poutine a peut-être insufflé une part de vérité dans une version éditée du dicton de Moshe Kantor : les restrictions imposées aux financiers juifs sont nécessaires pour la liberté de vivre une vie en sécurité.

French Translation: La cultura de la critique